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Pouvoirs

Officialisation de l’amazigh : On passe au concret

La circulaire numéro 1 qui vient d’être diffusée par le département chargé de la réforme de l’administration marque le point de départ de l’intégration de la langue dans l’administration publique. D’autres initiatives sont en cours de concrétisation.

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En à peine six mois la nouvelle équipe du gouvernement a déjà entamé de concrétiser un chantier qui a été retardé de plusieurs années. Il s’agit de la mise en œuvre du caractère officiel de la langue amazighe. On sait tous comment les deux gouvernements du PJD, surtout celui dirigé par Berkirane, avaient tout fait pour retarder le plus possible ce projet. On sait aussi comment le parti islamiste était parmi les deux formations qui s’étaient opposés à la constitutionnalisation de l’amazigh en tant que langue officielle. On sait également comment, bien après la promulgation de la nouvelle Constitution, le PJD s’était opposé à la transcription de la langue en graphie tifinagh et comment ses députés ont fait traîner l’adoption de la loi organique portant la mise en œuvre de l’article cinq de la Constitution. On sait enfin que parmi les promesses électorales du RNI, c’est justement d’accélérer ce chantier une fois aux affaires. Et c’est le cas. La circulaire numéro(1) de la ministre chargée de la transition numérique et de la réforme de l’administration, en date du 15 avril, porte justement sur l’intégration de l’amazigh dans la fonction publique. La circulaire adressée aux différents départements ministériels et aux établissements et entreprises publics, entre autres, se donne pour objectif de faciliter l’accès équitable de tous les citoyens aux services publics. Concrètement, tous les départements ministériels sont tenus d’intégrer la dimension amazighe dans tous leurs projets, leurs programmes et leurs initiatives, que ce soit au niveau central, décentralisé ou déconcentré et même au niveau des établissements dont ils assurent la tutelle. Pour commencer et d’une manière concrète, ils sont tenus de mettre en place certaines mesures immédiates dans différents domaines. En termes de communication et d’orientation, pour ceux qui disposent déjà de centres dédiés doivent les doter en ressources humaines maîtrisant la langue amazighe. Pour les autres, ils sont appelés à mettre en place des cellules de communication ou des hotlines à travers lesquelles ils vont communiquer avec les citoyens qui le souhaitent en langue amazighe, et cela pour toute demande de renseignement, d’information ou besoin d’orientation.

En matière de communication visuelle, les plaques signalétiques, les affiches, les panneaux, les noms sur les façades et autres moyens de communication visuelles et d’orientation doivent également être libellés en amazigh. De même, toutes les administrations sont tenues d’intégrer la langue dans leur site web et les applications qu’elles ont mises en place pour les besoins de service public. Enfin, les communiqués et les notes d’information adressés au public doivent être rédigés également en amazigh, de même pour les campagnes de communications et de sensibilisation qui doivent être déclinées aussi dans cette langue. Bien sûr, bien avant cette circulaire, plusieurs initiatives ont été prises ici et là dans le sens d’intégration effective de la langue amazighe dans l’administration et la vie publique. On retiendra dans ce cadre l’initiative du ministère de la justice de recruter une centaine d’assistantes sociales avec comme critère de base la maîtrise de l’une des trois variantes de la langue amazighe. Ces assistantes qui vont bientôt rejoindre leurs postes seront affectées au niveau des services décentralisés du ministère et seront mises à disposition des différents tribunaux. Leur mission sera, entre autres, d’accompagner les femmes justiciables depuis le début jusqu’à la fin des procédures judiciaires. Le nouveau ministre avait noté que le Fonds d’entraîde familiale, doté actuellement d’une cagnotte de 1 milliard de DH, n’a été sollicité depuis sa création qu’à hauteur de 20 millions de DH. La cause, une méconnaissance des femmes qui en sont la cible des procédures leur permettant d’en bénéficier. Dans le domaine de la justice, précisément, d’autres mesures devraient se concrétiser progressivement à l’avenir. Il s’agit notamment la garantie de la traduction simultanée de et vers la langue amazighe au sein des tribunaux et la traduction de et vers cette langue lors des procédures d’instruction, de plaidoirie, d’audition des témoins, de notification et même la possibilité de rendre les verdicts et jugements en langue amazighe.

En attendant, plus récemment, c’est le bureau et surtout la présidence de la première Chambre qui vient de mettre en place une initiative inédite. Désormais grâce à la traduction simultanée, les citoyens amazighophones auront accès au contenu des séances des questions orales retransmises en direct dans leur propre langue.

Notons par ailleurs que le gouvernement a entamé son mandat par la prise de mesures audacieuses et concrètes pour la promotion de la langue amazighe et ce, en allouant 200 millions DH, dans le cadre de la Loi de finances 2022, pour la mise en œuvre du caractère officiel de la langue amazighe. Cela tout en s’engageant à augmenter progressivement cette enveloppe pour atteindre un milliard de DH en 2025. Ce fonds servira justement à financer, entre autres, les mesures objet de la circulaire du département chargé de l’administration. Le gouvernement aura ainsi montré que son engagement pour la promotion de la langue et la culture amazighes n’est pas que des paroles en l’air. Aziz Akhannouch a d’ailleurs assuré à maintes reprises que l’officialisation de la langue amazighe et son intégration dans les divers aspects de la vie publique font partie des priorités du gouvernement. Il a également exprimé l’engagement du gouvernement à accélérer les chantiers stratégiques prioritaires stipulés dans la loi organique 26-12 relative à la mise en œuvre du caractère officiel de la langue amazighe et aux modalités de son intégration dans les divers aspects de la vie: enseignement, culture, système judiciaire et administration.