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Pouvoirs

Comment les hommes politiques passent leurs vacances

Un certain nombre d’hommes politiques se passeront de congé cette année,
élections communales obligent.
Abbès El Fassi et Mohamed Bensaïd Aït Idder seront à Agadir,
beaucoup se contenteront de week-ends au bord de la mer ou dans leur terroir,
tout près de leurs électeurs.

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A les en croire, les hommes politiques prennent rarement, ou pratiquement jamais, de vacances. Les ministres, encore moins. Du temps de Abderrahmane Youssoufi à la primature, ces derniers étaient autorisés à partir en congé pour une période variant entre une dizaine et une quinzaine de jours pendant le mois d’août. Et, bien évidemment, continuité du fonctionnement de l’Etat oblige, ils partaient à tour de rôle. Un gouvernement ne baisse-t-il donc jamais le rideau pour congé annuel ?
Il semble que Driss Jettou emboîtera le pas à son prédécesseur socialiste et autorisera ses ministres à partir pour deux semaines. Et lui-même, prendra-il quelques jours de relâche ? D’ailleurs, l’année n’a pas été de tout repos pour lui. Déjà, en tant que ministre de l’Intérieur, il avait travaillé avec une cadence infernale pour réussir les premières élections législatives sous le règne du Roi Mohammed VI. Des élections qu’on voulait transparentes et honnêtes. Il n’a pas déçu.
Une fois chef de gouvernement, il voulait relever un autre défi : frapper l’action de la primature du sceau de l’efficacité. S’offrir un repos après ce parcours du combattant n’est-il pas amplement mérité? Son agenda le lui permettra-t-il ? En tout cas, ce dernier était plein à craquer jusqu’au 30 juillet, jour de la fête du Trône. «Du 1er au 20 août, sa charge de travail s’allégera quelque peu», nous dit son assistante. «Ce sera alors peut-être le moment de prendre quelques jours de repos», suppute-t-elle.
C’est dire que le statut d’homme politique n’est pas une sinécure. Même en congé, qu’il soit ministre ou chef de parti, il n’a pas le droit de se déconnecter de la réalité politique ou de fuir ses responsabilités. Mais un déplacement à l’étranger pour un séminaire ou un colloque peut tomber à pic pour souffler un jour ou deux. C’est mieux que rien.
Plusieurs ministres et dirigeants de partis ne pourront pas se permettre un seul jour de vacances. Et pour cause, les premières semaines de la rentrée seront particulièrement chargées : communales, préfectorales et provinciales, renouvellement du deuxième tiers de la Chambre des Conseillers, et élections régionales qui constitueront la dernière étape de ce marathon électoral.

Cela n’empêchera pas Abbès El Fassi, secrétaire général du Parti de l’Istiqlal (PI), et ministre d’Etat sans portefeuille, de passer une petite semaine avec son épouse, les pieds dans l’eau, à Agadir. «Il faut être en forme pour les élections communales de septembre». Il pourra ainsi savourer la victoire de son parti au scrutin du 25 juillet.
Beaucoup aiment se reposer dans leur terroir

Mohand Laenser, secrétaire général du Mouvement populaire (MP) et ministre de l’Agriculture et du développement rural, ne prendra pas de congé avant la fin du mois de septembre. Et c’est à la montagne qu’il passera quelques jours à respirer l’air pur du Moyen-Atlas, du côté d’Imouzzer Marmoucha, son terroir. Combien lui coûte un congé de 15 jours? «Pas de vacances dispendieuses, répond-il, 20 000 à 25 000 dirhams en famille, mis à part les achats si je me rends à l’étranger.»

Mohamed Saâd Alami, membre du comité exécutif du PI et ministre chargé des Relations avec le Parlement, est, lui aussi, adepte du terroir. Il jure qu’il n’aura pas un seul moment de répit. Mais il serait l’homme le plus comblé du monde, avoue-t-il, s’il parvenait à passer un week-end ou deux à Chefchaouen, sa ville natale… Etre ainsi parmi les siens, «à réfléchir, méditer sur soi-même et sur les événements est en soi un repos.»

Nezha Chekrouni aura du pain sur la planche
Celle qui aura le plus de pain sur la planche cet été est sans conteste Nouzha Chekrouni, ministre chargée des Marocains résidents à l’étranger. Une saison bien remplie. En plus du dossier qu’elle gère, celui de la communauté marocaine en visite dans le pays, elle prêtera main-forte à ses amies socialistes dans leur campagne électorale pour les communales. Fini le congé de quinze jours qu’elle prenait avant de devenir ministre, ou même la petite semaine qu’elle s’offrait pendant son passage dans le gouvernement Youssoufi.
D’habitude, elle aime bien bronzer, en compagnie de son mari et de ses enfants, sur les sables dorés de Kabila ou de Cabo-Negro. Maintenant, elle se contentera de week-ends sur les sables non moins dorés de la plage de Bouznika. Mais elle ne se plaint pas, l’été est riche en festivals et en rencontres et c’est «avec passion et dans la joie» qu’elle fait son travail, affirme-elle.
Taoufik Hjira, le fringant ministre délégué chargé du logement et de l’urbanisme, lui, non plus, ne quittera pas la capitale, ou peut-être si, «une petite semaine», lâche-t-il, le temps d’accompagner l’aîné de ses quatre garçons en Espagne ou au Canada (ce n’est pas encore tranché) pour l’inscrire à l’université et l’aider à s’y installer.

Elections obligent, les politiques sont privés de vacances
C’est tout ce qu’il peut se permettre. Il en est à sa première année au gouvernement, et il se trouve en charge d’un dossier extrêmement important, celui de l’habitat. Il consacrera donc le mois d’août à potasser les projets, quitte à s’offrir des sorties en bord de mer pendant les week-ends.
Les secrétaires généraux ou dirigeants de partis politiques qui ne sont pas membres du gouvernement ne chôment pas non plus, loin de là. La proximité des élections exige d’eux de la disponibilité et un surplus de travail. Du coup, les vacances attendront, puisqu’ils ne peuvent se permettre de déserter leur QG à un moment aussi sensible.

«Les hommes politiques ne sont pas des ouvriers agricoles qui doivent prendre leur repos en période fixe», ironise Mahjoubi Aherdan, secrétaire général du MNP. Il y a quelques jours, il était dans la ville des lumières pour voir un ami souffrant, mais il a prolongé son séjour d’une semaine. L’amghar octogénaire aurait-il cédé à l’attrait des promenades sur les Champs Elysées, bien loin de son Oulmès natal où, d’ordinaire, il va se reposer ?
Les nostalgiques du terroir (par calcul politique, aussi, élections obligent), se contenteront de quelques escapades tout près de leurs électeurs. Ce sera le Souss, dans un premier temps, à Agadir exactement, pour Mohamed Bensaïd Aït Idder, président de la GSU. Il en profitera pour peaufiner sa fresque historique sur l’Armée de libération (dont un premier tome est déjà paru).

C’est à Tidas, dans la province de Khémisset, que Aïssa El Ouardighi, secrétaire général du PSD, coulera quelques fins de semaines revigorantes à l’air de la montagne, comme Laenser, du côté d’Ifrane et d’Azrou. Mais Aïssa vient de passer une dizaine de jours à Paris, en compagnie de son fils étudiant.

Quant à son allié politique, Ismaïl Alaoui, secrétaire général du PPS, ses dernières vacances «remontent à loin». Il les avait passées au bord de la mer, à Sidi Bouzid. Cette année, il s’offrira une dizaine de jours pendant le mois d’août dans le Nord (peut-être bien à Restinga), pour s’éloigner un peu des tracasseries de la vie politique et partisane.

Abdelilah Benkirane, membre du secrétariat général du PJD, est réquisitionné par le quotidien Attajdid ; les vacances, il s’en passera cette année, comme de nombreuses autres. Il n’a pas de temps à perdre, la refonte de la ligne éditoriale du quotidien du Mouvement unicité et réforme s’impose maintenant plus que jamais à la veille des échéances électorales. «Mes enfants, quant à eux, iront à Sfihat du côté de Oued Laou». Mais lui restera à Rabat.
Pour Aziz Rabbah, autre membre du secrétariat général du PJD, l’été ne sera pas de tout repos en raison des élections. Mais il compte tout de même aller au bord de la mer, à El Jadida, le temps d’une semaine, «pour prendre du recul, faire le point et préparer quelques dossiers». Il ne dépensera pas plus de 5000 dirhams. Bonnes vacances pour ceux qui peuvent se le permettre, et bon courage à ceux qui en seront privés. Ils pourront, de toute manière, se rattraper une fois l’agenda électoralo-politique épuisé