Culture
L’art traditionnel rural au Maroc
«L’art traditionnel rural au Maroc, de Tanger à Lagouira» est une exposition de la galerie de l’immobilier Prestigia Anfa, actuellement en déplacement à Marrakech, jusqu’au 31 janvier 2017.

Ya-t-il un art rural et un art citadin ? Vraisemblablement oui. Ce ne sont pas moins de 400 pièces traditionnelles de l’art rural, sélectionnées par les soins du collectionneur Khalid El Gharib, qui le prouvent. La richesse de ce patrimoine, jadis utilitaire, se manifeste dans toutes les disciplines créatives. Que ce soit dans la poterie, la céramique, la tapisserie, le textile, les bijoux ou les armes, chaque région détient ses propres codes artistiques qui ont évolué depuis le XVIe siècle et jusqu’aux temps modernes.
Khalid El Gharib s’est attelé à être le plus exhaustif possible, en mettant en exergue les nuances entre les œuvres issues de régions et de périodes différentes, pour une fois que l’art rural n’est pas noyé dans les ouvrages typiquement citadins des grandes villes impériales. «C’est la première fois que l’on organise une exposition dédiée exclusivement au monde rural marocain, de Tanger à Lagouira», confiait Khalid El Gharib à de La Vie éco (web). Le collectionneur a déjà, par ailleurs, prêté ses œuvres à l’Institut du monde arabe à Paris ou à Bruxelles. Il a également été à l’initiative de plusieurs livres d’art sur le patrimoine marocain, dont «La main au Maroc» et «Le Maroc, deux passions, une mémoire» avec le collectionneur Paul Dahan.
L’art et l’histoire
La collection «L’art traditionnel rural au Maroc, de Tanger à Lagouira» force le respect. Non seulement en raison de la valeur des objets exposés et qui peuvent dater de dix siècles, mais surtout de sa complétude et du grand nombre de renseignements qu’elle donne sur l’histoire du Maroc. A titre d’exemple, apprenez qu’au Nord du Maroc, la poterie était exclusivement féminine, créée pour les besoins domestiques, alors qu’au Sud, les potiers étaient des hommes, organisés en corporation, pour produire et vendre dans les souks proches. On saura également que les plus anciens ateliers du Maroc sont ceux de Tamegrout qui perpétuent, jusqu’à présent, des secrets de fabrication ancestraux.
Dans le vêtement comme dans le métier à tisser, l’expression artistique prenait des aspects identitaires, puisque chaque village avait son code de couleurs et ses motifs. Les femmes, surtout, signifiaient leur humeur, leur sensibilité et leur esthétique par ce rare moyen d’expression. On apprendra sur ce corps de métier que la tradition amazighe privilégie les pièces de tissu rectangulaires et semi-circulaires, drapées et épinglées tandis que les habitants des régions arabophones préfèrent les tissus coupés et cousus.
Le bijou, fortement représenté, dévoile également ce sens esthétique partagé par l’ensemble des régions du Maroc. Mais l’on apprend, par exemple, qu’en plus de sa valeur matérielle qui désigne un rang social, un bijou pouvait servir d’arme pour l’autodéfense des femmes, comme il est le cas pour le lourd bracelet en argent dentelé pourvu de pointes, des Aït Atta.
Mukahlas de 1m 60, sertie d’ivoire, d’argent et de corail, boîtes à poudre incrustée et portée en bandoulière, poignard, symboles de virilité, y sont également mis en avant. La très belle collection de la galerie de l’immobilier Prestigia Anfa a de quoi séduire les amoureux de l’histoire ou inspirer les designers férus du patrimoine marocain. Elle reste à Marrakech jusqu’au 31 janvier.
