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Culture

Anna Kaona : calme, récup’ et volupté

Les passionnés d’objets d’art et d’intérieurs poétiques devraient se précipiter chez Fathia El Aouni, fondatrice de la galerie Anna Kaona à  Casablanca et découvreuse de talents neufs et singuliers.

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anna koana 2014 09 01

Anna Kaona a élu domicile dans un rez-de-chaussée douillet et harmonieux du quartier C.I.L de Casablanca. Ici, vous ne risquez pas de longer, raide comme un piquet, des couloirs spartiates et guindés, à la recherche d’une émotion fugace accrochée à un mur. Bien au contraire, la sérénité des lieux vous gagne; très vite, vous vous délestez de votre armure et vous flânez, insouciant et le sourire aux lèvres, parmi les meubles et les bibelots. Même l’œil exorbité de Salvador Dali qui plane au-dessus de la cheminée ne vous arrachera pas un frisson de perplexité! «Les visiteurs boivent leur café dans des tasses qui sont en vente. Ils peuvent s’installer où ils veulent, sur le canapé anglais ou dans le jardin, attraper un coussin, un livre et s’allonger sur le tapis. Je veux que l’on puisse se sentir un peu comme chez soi, ici», explique Fathia El Aouni, notre hôte affable, qui insiste sur le caractère singulier de cet espace : «Ce n’est ni une galerie, ni une boutique, ni un café, ni un concept store».
Peut-être un peu de tout cela à la fois, avec un supplément d’âme et de mystère. Chaque objet raconte une histoire, si vous me permettez cette formule quelque peu galvaudée : on se penche sur un sofa et on y découvre un patchwork de vieilles étiquettes de pantalons ; des abat-jours coiffent des bobines à tricoter élégamment assemblées, des lampes-bibliothèques éclairent les plafonds et les esprits. «Ce sont quelques-unes des choses que j’ai créé moi-même, avec ce canapé orange, fait à partir de chutes de tissus anglais. C’est ma fille Nina qui a choisi les couleurs et les motifs», sourit fièrement Fathia.
Les autres objets ont été façonnés par des artistes et des artisans peu connus, jamais ou rarement exposés, dénichés grâce au bouche-à-oreille et aux réseaux sociaux. «Nous étions onze créateurs au lancement d’Anna Kaona, en février 2014. Aujourd’hui, nous sommes vingt-deux». Parmi ces talents neufs, citons aléatoirement Ali El Jabiry, auteur d’une magnifique table en pneu recyclé – si, si, je vous jure ! -, Abdeslam Bakkali, tisserand tangérois qui réinvente et sublime les étoffes traditionnelles, Ali Drissi, jeune cadre dynamique dont le dada est le stylisme et qui puise une folle inspiration dans des courants artistiques comme l’art abstrait ou le pop’art – ses jupes clin d’œil à Mondrian et à Yves Saint- Laurent sont particulièrement belles. Dans un coin de la galerie, une vitrine propose les bijoux en pierres semi-précieuses et perles de passementerie marocaine d’Amel Abou El Aazm, créatrice établie à Montréal; disséminés sur les murs, les tableaux du designer graphique Nabil Rochd offrent des portraits calligraphiés en caractères arabes des grands de ce monde, d’Oum Kaltoum à Marylin Monroe en passant par Gandhi ou Jimmi Hendrix… «Anna Kaona est comme un tremplin pour tous ces artistes. Évidemment, ils peuvent exposer ici tant qu’ils le souhaitent chez moi, mais l’idéal serait qu’ils prennent leur envol, soient repérés par d’autres galeries, de façon à laisser de nouveaux créateurs aspirants montrer leurs œuvres», affirme Fathia El Aouni.
Diplômée en stylisme, notre hôte, qui mène en parallèle une carrière de journaliste à 2M, a, dans une vie antérieure, déjà ouvert à Bordeaux une boutique dédiée aux arts de la table. Baptisée, là encore, Anna Kaona, en hommage à Annacoana, une guerrière et poétesse haïtienne du XVe siècle, l’une des premières résistantes aux conquistadors espagnols, symbole féministe aux Caraïbes. «Anna Kaona s’ouvrira bientôt au travail des associations, celles qui autonomisent les femmes en particulier, pour révéler et vendre leurs créations», promet Fathia El Aouni. Découvrez sa galerie en tapant Anna Kaona sur Facebook.

Au 19, rue Ras El Ma, quartier C.I.L, Casablanca. Ouvert du mardi au samedi de 14h à 19h.