Culture
«Le livre est un outil magique qui ouvre les portes du monde»
La fondatrice des éditions Yomad lance en septembre une opération Lecture destinée aux enfants. Les séances se dérouleront chaque dimanche matin sur le parvis de la Bibliothèque nationale, à Rabat.

​Qu’est-ce que Lire pour grandir ?
C’est une action autour du livre et de la lecture. Elle accueillera des enfants de 1 à 14 ans pendant deux heures de temps une fois par semaine. Plusieurs genres de livres seront mis à leur disposition. Des albums, des contes, des documentaires, des romans, des romans historiques, des bandes dessinées. L’enfant aura à choisir le livre qu’il voudra lire et se joindre à un groupe animé par un(e) bénévole. Pour les plus âgés, ils pourront disposer du livre de leur choix et prendre le temps de le lire. Ce sera un moment de partage, de convivialité et d’échanges au milieu des livres. Le but est de donner le goût de la lecture aux enfants et aux jeunes et ainsi installer une tradition de lecture.
​Vous voulez «faire naître dans le cœur des enfants le désir de lecture». Comment comptez-vous vous y prendre?
C’est avant tout un défi. «Les gens ne lisent plus». «Les jeunes ne lisent pas». Combien de fois ai-je entendu ces plaintes avec un mélange de désespoir et de mépris ! Je voudrais prouver à ceux-là qu’ils ont tort. La lecture est une éducation comme une autre, il suffit de l’inculquer aux enfants. De par mon expérience au contact des enfants, je peux vous assurer que l’enfant marocain n’est pas différent des autres enfants. Il suffit de lui lire un livre, qu’il vous en réclame un autre. Le livre est un outil magique, il attire, il éduque, il fait voyager, il fait rêver, il donne du plaisir, il vous ouvre les portes du monde et de ses différentes cultures en plus d’être aimant. C’est le compagnon fidèle qu’on peut susciter à n’importe quel moment, il sera toujours à vos côtés.
​Au Maroc, ​le rituel, la tradition de lecture n’a jamais pu se mettre en place, n’est que très peu encouragé. À quoi cela est-il dû à votre avis ?
La réponse à cette question nécessiterait des pages. Mais je vais résumer en disant que la responsabilité est partagée entre les parents, l’école, la société et les médias. Les parents parce qu’ils ne lisent pas et donc ils ne peuvent transmettre l’amour du livre à leurs enfants. Le système de l’enseignement est plus que défaillant, il n’attribue aucune place à la lecture dans le programme scolaire et ne l’encourage aucunement. La société parce qu’elle n’offre pas assez d’espaces culturels réservés à l’enfant. Absence de bibliothèques de quartiers, absence de cinémas, de théâtres, de centres culturels… La liste est longue. Quant aux médias, ils boudent les émissions culturelles à l’adresse des enfants. Tous ces ingrédients représentent un obstacle à la lecture en particulier et à la culture en général.
Que peut-on faire pour devenir une nation qui lit ?
Se mobiliser pour installer une tradition de lecture. Pour ce faire, les parents devraient apprendre à acheter des livres à leurs enfants, à offrir des livres en guise de cadeaux. Prendre du temps pour lire à leurs enfants. Les prendre de temps en temps pour aller visiter une librairie ou une bibliothèque. En somme, rapprocher l’enfant du livre. L’école devrait donner de l’importance à la lecture. Les enseignants devraient créer des bibliothèques de classes en demandant aux élèves de ramener chacun un livre et monter ainsi une bibliothèque. Responsabiliser à tour de rôle les enfants pour la gestion de leur bibliothèque.
Il n’y a pas meilleur conseiller qu’un enfant qui recommande un livre qu’il a aimé à son ami(e). La société: nos dirigeants doivent comprendre que sans culture, il n’y a pas de développement. Ils doivent créer des bibliothèques pour faciliter l’accès au livre par le biais de l’emprunt. Créer des théâtres, des cinémas pour les enfants. Ces derniers sont marginalisés dans notre société. Rien ne leur est consacré. Ce sont les oubliés de notre nation. Enfin, les médias doivent proposer aux enfants des émissions qui stimulent leur esprit et non les abrutir.
