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1993 : Un marché financier en émergence

Il y a 30 ans, le Maroc n’était pas considéré comme un Nouveau pays industrialisé (NPI) méditerranéen. Mais ses performances économiques et ses caractéristiques le font d’ores et déjà qualifier de marché financier émergent.

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Vu l’ampleur de l’opération de privatisation en cours, sur fond de stabilité politique et de rétablissement des grands équilibres macro-économiques de l’État, le Maroc ne pouvait pas ne pas se trouver sur la ligne de mire des bailleurs de «fonds internationaux». Pour soutenir cette vague de transferts au secteur privé d’entreprises publiques plus ou moins performantes, la Bourse des valeurs de Casablanca ne pouvait plus vivre au rythme des années soixante et sa réforme est aujourd’hui virtuellement acquise.

La place de Casablanca est ainsi appelée à se métamorphoser en «marché financier émergent». La Bourse de Casablanca se retrouve, de par ses structures et son activité, dans l’éventail des critères requis. Mais à quoi reconnaît-on la performance des marchés financiers émergents ? Et le marché financier marocain recèle-t-il les déterminants d’une telle performance ? La réponse à cette double interrogation est à rechercher dans trois facteurs essentiels. Il s’agit des résultats de la politique économique en vigueur, des mesures de libéralisation (notamment la création de nouveaux instruments de placement) et, bien entendu, d’un processus de privatisation.

Sur le premier point, il est évident que tout développement d’un marché financier reste tributaire des résultats de la politique économique suivie. Mais la sensibilité des marchés financiers en décollage est beaucoup plus prononcée que pour les pays développés. Cela est considéré par les spécialistes comme allant de soi, compte tenu de la fragilité (non encore résorbée) de leur situation. Notamment au niveau des deux principaux indicateurs que sont le PIB (Produit intérieur brut) et le déficit budgétaire.

Pour ce qui est du deuxième point, à savoir les nouveaux produits d’investissement, force est de souligner que la transparence d’un marché financier est susceptible de drainer de nombreux investisseurs. En effet, la création de produits d’épargne collective est ainsi de nature à donner aux marchés naissants la «base institutionnelle indispensable à leur bon fonctionnement. Quant aux privatisations, elles constituent en quelque sorte la «phase de différenciation» pour emprunter la formule – laconique il est vrai – aux biologistes, en vue de permettre à un marché naissant de véritablement émerger.

Tel le Mexique ?
Il est à cet égard important de faire état du cas du Mexique dont le programme de privatisation a été quasi exclusivement exécuté par le canal de la Bourse. Les répercussions positives sur la Bourse de Mexico ne se sont pas fait attendre. Car, aujourd’hui, cette place émergente modèle attire même les petits porteurs nord-américains.

Par ailleurs, l’effet bénéfique que peut avoir un mouvement de privatisation sur un marché financier émergent où la concentration de la capitalisation se fait, nous l’avons vu, sur un petit nombre d’entreprises cotées, consiste dans l’amélioration de sa liquidité. En effet, celle-ci s’obtient par le biais de l’allègement de la concentration des transactions, dû à l’augmentation du nombre de sociétés entrantes. Les trois dahirs portant lois destinés à moderniser la Bourse de Casablanca portent assurément (pourvu que la pratique en soit rigoureuse) dans le sillage de ses dispositions la clé de l’efficience escomptée d’une place émergente ci-dessus décrite.

La crise qui s’installe actuellement dans les pays industrialisés et frappe de plein fouet leurs places financières, sensible baromètre de leur santé économique, oblige les investisseurs potentiels de ces contrées au flair ô combien aigu pour les affaires, à rechercher un repli stratégique en se retranchant dans une base arrière assez sûre. Et il se trouve que les marchés financiers émergents, qui représentent pour eux une bénédiction du ciel, offrent la sécurité convoitée.

Les milieux initiés ne sont pas sans savoir que 1992 a été un exercice boursier particulièrement morose au niveau mondial. Mais la part des marchés financiers émergents dans les portefeuilles institutionnels a quadruplé en quatre ans. Et tous les experts s’attendent à ce que «ces nouvelles zones de croissance», dont le Maroc, fassent l’objet d’un engouement de la part des investisseurs internationaux.