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Idées

Le procès à  faire

La Jordanie a lancé un mandat d’arrêt international
à  l’encontre du député néerlandais d’extrême-droite Geert Wilders, pour son film «Fitna», mis en ligne en mars dernier, et qui compare le Coran au «Mein Kampf» d’Hitler. En vérité, le vrai procès que devrait intenter
le monde musulman concerne ceux qui offrent à 
des individus de cet acabit de quoi nourrir leur vindicte
à  l’égard de la civilisation islamique.

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La Jordanie vient de lancer un mandat d’arrêt international à l’encontre du député néerlandais d’extrême droite Geert Wilders, l’auteur de Fitna, le film anti-islam mis en ligne en mars dernier. Pourtant, si un procès devait être intenté par les musulmans, ce serait celui à faire, devant le tribunal de l’Histoire, à tous ceux qui instrumentalisent l’islam et le réduisent à être l’exutoire de leurs névroses.

Le mal causé par Ben Laden et ses thuriféraires, par ces fous furieux qui vous tranchent une tête comme on fait sauter un bouchon de bouteille et par les non moins délirants «commandeurs du bien et du mal» qui sévissent à coup de fatwas excommunicatrices est sans nom.

On leur doit d’avoir transformé la religion de Mohammed en un horrible épouvantail, de l’avoir défigurée comme jamais. Dans sa perception par le monde présent, une image désormais domine qui annihile les autres et cette image-là est celle de la colère et de la haine, du sang répandu et des regards exorbités.

Vidéo de 16 mn, fort bien ficelée par ailleurs, Fitna présente l’islam comme la religion du fanatisme. A travers la vision apocalyptique qu’elle en offre, elle assimile le milliard d’hommes et de femmes qui placent leur foi en Allah à des malades mentaux et à des terroristes en puissance. Son réalisateur, Geert Wilders, par ailleurs chef de file du PVV, a réussi le tour de force de porter l’insulte au sommet tout en se maintenant dans les limites de la loi. Le film en effet est construit à partir du texte coranique.

Ce sont des sourates choisies qui font la trame du scénario. Aucun autre commentaire ne les accompagne. Mais leur illustration puise dans tout ce que l’actualité intégriste a produit comme joyeusetés au cours de ces dernières années, pendaisons, égorgements et appels au meurtre faits au nom de l’islam. Le résultat est dévastateur.

Craignant à juste titre des réactions violentes à l’image de celles provoquées par l’affaire des caricatures, le gouvernement néerlandais avait pris les devants dès décembre, demandant à Wilders de ne pas monter son film et le menaçant de poursuites pour incitation à la haine. Mais l’extrémiste de droite, qui qualifie l’idéologie islamique de «fasciste» et estime que le Coran devrait être interdit au même titre que Mein Kampf, le livre d’Hitler, ne s’est pas laissé impressionner pour autant.

Il a jeté son film sur la toile, le livrant au visionnage de millions d’internautes à travers le monde. Si le ministère public néerlandais, compte tenu de la loi du pays, a renoncé à le poursuivre, la Jordanie vient pour sa part de retenir cinq chefs d’accusation à l’encontre du député le plus en vue des Pays-Bas. Mais ce n’est pas ce qui va arrêter la croisade anti-islam de l’intéressé. Depuis la mort de Theo van Gogh, un cinéaste assassiné en 2004 à Amsterdam par un jeune islamiste néerlando-marocain, Geert Wilders vit sous l’étroite protection des services secrets.

Il change de résidence tous les soirs, ne voit sa femme qu’une fois par semaine et se trouve en permanence en compagnie de six ou sept gardes du corps. Cela ne l’empêche pas de continuer à répéter que l’islam relève d’une «culture arriérée» et qu’il est «incompatible avec la démocratie». Non, en vérité, le vrai procès que devrait intenter le monde musulman concerne tous ceux qui offrent à des individus de cet acabit de quoi nourrir leur vindicte à l’égard de la culture et de la civilisation islamiques.

A tous ceux qui vident l’islam de ce qui fait sa grandeur et sa beauté. A force d’être soi-même exposé à longueur de temps à la harangue fondamentaliste, on en arrive à oublier combien la foi en Dieu peut être source de coexistence pacifique entre les êtres. Combien elle peut nourrir la générosité du cœur et la sérénité de l’âme. Pour ce faire, il suffit de tendre l’oreille et d’écouter comment des personnes simples, qui ne sont pas polluées par l’idéologie intégriste, effectivement fasciste, s’expriment.

Tous leurs propos, et leurs actes, sont habités par le sens de l’autre et du respect qui lui est dû, par les notions du juste et du bon. C’est dans cela que grandirent nos parents, dans cet islam de la tradition, solidaire et bienveillant, que les Robespierre du temps présent se sont employés à discréditer, expliquant à leurs aînés qu’ils n’avaient rien compris à rien.

La bonne lecture du texte, c’était eux, leurs enfants, qui la possédaient, parce qu’eux avaient été à l’école et s’étaient institués exégèses du texte sacré. Des exégèses oui, mais de la pensée courte et de l’esprit clos! On voit aujourd’hui où leur «science» conduit les sociétés musulmanes. Ce cancer, car cela en est un, mine l’évolution de ces dernières de manière dramatique. Fort heureusement les antidotes existent et, ces antidotes, l’âme profonde des peuples en est porteuse.