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Idées

epitaphe…

L’ogre que craignent les politiques,
qu’ils continuent à suivre dans ses faux débats
et son analphabétisme politique n’est en fait qu’une profession
à l’agonie.
Sûrement la plus en retard par rapport au niveau de développement
du Maroc.

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Indignation et solidarité, deux mots qui s’imposent à tout être normalement constitué. Indignation face à l’abjecte campagne visant l’honneur d’un homme. Solidarité avec l’homme, Fathallah Oualalou, sa petite famille et ses amis.
Au-delà, il faut déterminer les responsabilités. La justice fait son travail, mais Radio-Médina, comme d’habitude, a ses thèses, ses coupables. La «complotite» habituelle bat son plein. Ainsi, selon les uns, la CDT aurait largement contribué à amplifier la campagne indigne et son fax aurait arrosé le Royaume. D’autres avancent une thèse encore plus «sexy» ; Fathallah Oualalou aurait été chargé par le Roi de jeter un regard sur les marchés de l’armée. Sornettes que tout ça ! Il y a deux coupables, Fathallah Oualalou et moi-même, et les deux corporations que nous représentons.
La dérive dans la presse écrite est là depuis bientôt cinq ans. L’auteur de ces lignes a laissé ses dents dans un combat qui n’avait pas l’air d’intéresser grand monde. Les journalistes courageux sont devenus ceux qui salissent tout le monde, sans preuves ni scrupules. Les coups bas étaient quasi quotidiens. Des citoyens marocains étaient traités de voleurs, de proxénètes, sans que personne ne réagisse. Quant il s’agit de simples citoyens, souvent impliqués par leur voisin par ailleurs, c’est le pot de fer contre le pot de terre, mais quand il s’agit de responsables ?
Rappelez-vous El Yazghi ministre du porno !, ou encore Abdelali Ben Amour, l’homme qui fait fortune grâce aux feuilles liciencieuses. Rappelez-vous les attaques sentencieuses contre la probité de responsables, juste «réprimées» par des droits de réponse tronqués, décrédibilisés.
C’est là où nos deux corporations, celle à laquelle j’ai honte d’appartenir et celle de Oualalou ont failli. Par lâcheté, au mieux par complaisance aveugle, ils ont laissé se développer ce cancer qui, aujourd’hui, s’est accompli dans le faux scoop hideux d’Akhbar Al Ousboue.
Dans les milieux de la presse on se voulait solidaire, voire heureux des espaces de liberté conquis. Lors du débat sur le Code de la presse, les professionnels ont refusé les peines privatives de liberté parce qu’anti-libertaires, et l’augmentation des amendes parce que la profession est pauvre. J’étais, et je m’en glorifie, le seul journaliste à écrire que nous n’étions pas de super-citoyens et que la diffamation, l’acharnement malveillant, doivent être sévèrement punis. Devenu «sécuritaire» parce que défendant mon métier contre les prédateurs, les escrocs et les malades, j’ai été isolé. Aujourd’hui, alors qu’une refonte du code est en vue, pour justement éradiquer les peines de prison, il faut se remémorer ces années de folie où l’honneur des gens a été livré à des chiens sans vergogne juste parce qu’ils ont une carte que les meilleures plumes du pays refusent même de demander. L’un des arguments les plus répandus ferait rire n’importe quel juriste sérieux : si la presse regorge de ragots c’est qu’elle manque de sources. Je n’ai pas d’info donc je vous balance de la médisance de café du commerce. Si le charcutier du quartier vous vend des steaks d’ânesse il va en prison, si le journaliste vous vend des calomnies il est étiqueté courageux et vous êtes nombreux à l’acheter et
surtout à défendre «la liberté d’expression» s’il est poursuivi.
La corporation de Oualalou a laissé faire, refusé d’ester en justice, s’est couchée devant cette déferlante de l’ignoble. Elle récolte aujourd’hui les fruits de son attitude.
Le public lui, quoi qu’on en dise, n’est pas dupe. Le lectorat baisse inexorablement, alors même que les titres poussent comme des champignons. L’impact est faible, très faible, le crédit quasi nul. L’élite se détourne d’une presse qui l’a fortement déçue. Le marché publicitaire se contracte par l’effet de l’émergence d’autres médias, l’affichage notamment, mais aussi parce que les managers se détournent de la presse écrite. L’ogre que craignent les politiques, qu’ils continuent à suivre dans ces faux débats et son analphabétisme politique n’est en fait qu’une profession à l’agonie. Sûrement la plus en retard par rapport au niveau de développement du Maroc.
Envoyer Anas Machin en prison avec les applaudissements du syndicat n’y changera rien. C’est en revoyant toute l’organisation du métier de journaliste que l’on peut encore sauver les meubles. Non pas en commençant par le haut et en cédant aux pressions corporatistes de journalistes qui n’ont pas honte de sortir un journal pour 120 lecteurs, mais en reposant la seule question qui vaille : qu’est-ce qu’une presse citoyenne et comment y arriver ? En attendant le réveil des professionnels sérieux et la fermeté des décideurs, que Fathallah Oualalou accepte mes excuses, au nom des journalistes qui critiquent son action publique et lui portent de l’estime. Ils sont nombreux et il est fort estimable. Il fait de la politique depuis 45 ans, il n’a jamais attaqué personne en dessous de la ceinture