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Idées

Certification : pour des normes crédibles !

Incursion dans les méandres d’un processus vital pour les marchés concurrentiels modernes. Les farbricants se livrent une bataille de prix sans merci. La certification, quand elle est crédible et sans complaisance, est le meilleur moyen de décourager les tricheurs et protéger le consommateur.

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La confiance n’exclut pas le contrôle. C’est l’adage contemporain qui justifie toute démarche de contrôle qu’exerce un client sur son fournisseur. Les autorités, elles, ne s’encombrent pas d’une telle précaution. Leur rôle et leur raison d’exister sont justement le contrôle et la régulation pour s’assurer du respect de la loi. Dans un monde parfait, chaque maillon de la chaîne de production se conformerait à la même éthique, aux mêmes règles de l’art, aux mêmes standards de réalisation et de commercialisation. Dans ce monde-là chacun serait logé à la même enseigne. Les prix seraient les mêmes partout ainsi que la qualité des produits et services. Il en serait de même pour les niveaux de vie.
Mais ce monde «parfait» n’est pas réaliste ni réalisable. Le monde actuel de libre circulation est un monde concurrentiel. Aussi, paradoxalement, il a des vertus. Oui, il faut bien lui reconnaître des vertus. Reconnaissons donc que le citoyen du monde n’a jamais autant pris l’avion que depuis ces dix dernières années, où l’on peut acheter un Bruxelles-Tanger pour 29 euros. Il s’est même «démocratisé» puisque le plus grand nombre peut avoir accès aux objets et services réputés les plus chers et donc les plus discriminants.  
Une des raisons principales de ces évolutions et de ces ouvertures au grand nombre : la concurrence. Plus l’offre est large, moins les prix sont élevés. C’est un fait. A contrario, moins il y a de concurrence, mieux le fabricant se porte. Plus le produit est rare, plus il est cher. Son prix est déterminé au bon vouloir du fabricant, lequel soigne bien ses marges. Pourquoi s’en priverait-il. Cela est normal et compréhensible : il se paye pour l’originalité et la rareté de son produit.
Toutefois, parmi les dangers qui accompagnent la frénésie des baisses de prix (et donc de l’augmentation du nombre de concurrents), la tentation de tricher est grande. Mais tricher un peu, beaucoup, est souvent tentant, surtout lorsque «ça ne fait de mal à personne». Non pas au point de commettre des délits. Tricher juste ce qu’il faut pour soigner ses marges. Sans intention de nuire. Modifier légèrement une recette, utiliser une matière première de moins bonne qualité, déclarer des propriétés qui ne sont pas avérées (allégations) alors même qu’elles sont difficiles à vérifier, baisser insidieusement les poids des marchandises, mélanger les éléments authentiques avec d’autres qui ne le sont pas…

Quelle est la crédibilité d’une certification aux yeux de l’utilisateur, des autorités et du marché ?

Entendons-nous bien. J’évoque ici les «triches» banales. Celles qui n’ont pour but que de baisser les prix, ou de gagner plus que le voisin en écoulant autant. L’ingéniosité des tricheurs surprendra toujours, voire épatera. Elle énervera aussi. Elle agacera la majorité de ceux qui n’y ont pas pensé, ceux qui refuseront de s’y prêter et qui en seront les premières victimes.
Alors que faire ? Accentuer les contrôles ? Sanctionner les rares tricheurs pris sur le fait ?
Beaucoup de marchés font ce qu’on appelle de l’autorégulation. Pour cela ils établissent des normes puis invitent leurs pairs à y souscrire et à accepter des contrôles réguliers pour vérifier qu’ils s’y conforment. Si tel est le cas, les bons élèves reçoivent la distinction qui témoigne de leur probité et de leur excellence. Les autres n’en seront pas. Cette distinction est une sorte de blason qui fait la fierté de ceux qui l’arborent. Longtemps il fut question que cette distinction permettrait de mieux vendre ses produits. Les vendre plus chers ou au moins sans efforts pour convaincre de leur bonne qualité. Certaines normes «parlent» au consommateur final. Leur logo est affiché sur le produit final. Il s’agit souvent de normes décrivant la meilleure qualité d’un produit ou d’un service. D’autres normes sont inconnues du consommateur final. Ces dernières décrivent généralement des critères de sécurité ou des paramètres intrinsèques qui ne sont pas «communicants». Donc non valorisables sur les marchés aux yeux du consommateur. Par contre, l’acheteur professionnel avisé les exige et en fait un préalable à son acte d’achat ou de référencement d’un fournisseur.
Une norme n’a d’intérêt que si elle fédère le plus grand nombre. Si la majorité des opérateurs la reconnaissent, si leurs clients la réclament comme préalable. Une norme s’exprimera seulement lorsqu’un auditeur indépendant, compétent, intègre et impartial constate que telle entreprise se conforme à ladite norme. Par la suite, un comité indépendant de l’auditeur lui-même valide cette conformité et émet le sésame qui atteste que la situation auditée est certifiée conforme à la norme. D’aucuns protesteront du contrôle de la compétence de l’auditeur lui-même. Et ils auront raison. L’auditeur n’est pas plus expert que l’entreprise qui met en œuvre un dispositif pour se conformer aux normes. Alors, comment peut-il clamer qu’il sait débusquer les écarts ? Qui garantit sa probité et sa compétence ? Comment un auditeur marocain peut faire valoir ses compétences, lorsque plusieurs entreprises marocaines ont recours à des auditeurs venant d’Europe et d’ailleurs ? Que valent les schémas de reconnaissance dans ce domaine ? Les réponses à ces questions contribuent à la crédibilité d’une certification aux yeux de l’utilisateur, des autorités et bien sûr du marché. Ces réponses peuvent également contribuer à l’inverse. A savoir au peu de cas que le marché peut faire de telle ou telle certification si sa réputation est entachée. Par exemple, lorsqu’il est aisé de parvenir aux certifications les plus difficiles par des moyens de complaisance, ou lorsque l’on jette le soupçon sur l’acquisition monnayée d’une certification, ou encore lorsque l’auditeur se laisse séduire par une proximité intéressée de l’audité.

Amas des chaînes de reconnaissance

Ici intervient le dernier maillon de la chaîne de reconnaissance. Un organisme d’audit doit, de son côté, accepter le contrôle par tiers. Cela s’appelle l’accréditation. Les organismes accréditeurs sont le dernier recours pour la fameuse régulation évoquée ci-dessus. Généralement instaurés par la volonté des gouvernements dans chaque pays, ces organismes d’accréditation doivent se distinguer des autorités administratives et fonctionner  comme des associations composées des parties intéressées, y compris des utilisateurs finaux des certificats, voire des représentants des consommateurs. L’accréditeur vérifie la compétence et l’intégrité des organismes d’audit, pour renforcer la crédibilité d’un certificat délivré par ce dernier.
Mais l’accréditeur est-il compétent, intègre et impartial ? Qui contrôle l’accréditeur ? Nous voyons ici poindre une sorte d’exaspération : où s’arrêtera le contrôle du contrôleur, et le contrôle de ce dernier ? La chaîne de contrôle n’a de sens que si la communauté admet et reconnaît l’autorité des instances installées à cette fin. Tout pays doit disposer de son système de «contrôle» de cette chaîne pour contribuer à cette démarche. Ainsi, tout produit, système ou service certifié, conforme à telle ou telle norme, pourra mieux jouir de la distinction méritée par cette conformité. Alors, chers entrepreneurs et industriels, contribuez à cette marche en avant, et n’hésitez pas à faire certifier vos atouts.