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Au Royaume

L’équité fiscale à la barre !

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Edito

C’est un secret de polichinelle : l’évasion fiscale est un sport national. Sous-déclaration, achat de factures, paiement cash au black…, les techniques de fraude sont aussi nombreuses que diverses sous nos cieux. Les raisons qui poussent les contribuables à ce genre de pratiques sont également multiples. Mais s’il faut en retenir une, commune pour tout cas de figure, ça serait sans doute ce sentiment exacerbé d’iniquité fiscale.
Le contribuable a l’impression qu’il ne reçoit rien en contrepartie de la part de cet Etat auquel il verse une dîme. Discutable et contestable forcément, puisqu’il s’agit d’une perception… Le contribuable ressent également que tous les Marocains ne sont pas logés à la même enseigne. Ceux qui paient beaucoup (ça aussi c’est une perception) sont frustrés de voir d’autres payer peu, voire ne rien payer du tout… Et là, il faut reconnaître que notre régime fiscal est tout sauf homogène et encore moins équitable.
Sans abonder dans le choix de politique fiscale qui consiste en un arbitrage sur les niveaux de taxation du capital ou du travail, relevons déjà que les prélèvements appliqués à chacune de ces deux vannes fiscales ne sont pas au même seuil. Pourtant, le principe fondamental d’un système à même d’établir une confiance avec le «tax-payer» est d’une simplicité déconcertante : à revenu égal, impôt égal. Son application sur le terrain est bien plus complexe, surtout lorsqu’on traîne un lourd héritage : un Code général des impôts gruyère, troué de niches d’optimisation ou d’évasion fiscales.
Il n’y a pas un seul ministre des Finances qui n’a pas évoqué la nécessité d’aller vers une homogénéité des barèmes d’impôt. L’équipe de l’Exécutif aux manettes actuellement tente de transformer cette doctrine en acte. Du moins, elle cherche à enclencher un processus qui va dans ce sens via son (véritable premier) projet de Loi de finances. Les propositions soumises au vote des élus tendent à unifier ou du moins à réduire le nombre de barèmes d’imposition à la TVA, à l’IS, ou encore à l’IR…, ces trois grands impôts qui font recette au Royaume.
C’est dans cette logique que le PLF propose une unification du taux à 20% (non libératoire, avec droit de restitution) des personnes percevant des honoraires, commissions ou autres rémunérations assimilées, qu’elles soient soumises à l’IS ou l’IR. Et dans ce contexte de crises et de pression budgétaire inédite, l’Exécutif a légitimement cherché à sécuriser et réguler ses futures rentrées d’impôts en recourant au mode de collecte le plus efficace qui marche chez nous : la retenue à la source.
Sauf que cela ne semble pas être du goût des professions libérales (avocats, notaires, médecins et autres) jusqu’à récemment habituées à déclarer ce qu’elles veulent avec parfois des montants risibles qui feraient qu’une caissière de supermarché peut payer plus d’IR qu’un avocat qui roule en Aston Martin.
Lorsque le gouvernement propose le versement d’une avance symbolique (entre 300 et 500 dirhams) par les avocats sur chaque dossier qu’ils représentent devant les tribunaux, ils broient du noir. La mobilisation du puissant lobby des robes noires a même contraint le ministre délégué au Budget à faire marche arrière et concéder de revoir cette disposition.
Cette levée de boucliers est peu compréhensible. En quoi le paiement d’une avance sur impôt pourrait être dérangeant ? Auraient-ils l’intention de ne pas déclarer l’ensemble des dossiers qu’ils auront à traiter ? Peu probable, vu que le fisc a désormais la capacité de croiser les informations. Il a accès aux bases de données des tribunaux et pourra affiner ses données au fur et à mesure que le chantier de la digitalisation de l’administration avance. En gros, les vérifications et contrôles vont devenir plus accessibles, plus simples. Les sanctions plus lourdes, plus dissuasives. Et ce n’est que justice. Ce n’est que la bonne démarche pour espérer une équité fiscale.