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Vidéo. Souveraineté alimentaire : Une feuille de route et des défis

Le ministre de l’Agriculture, Mohamed Sadiki, a décliné la vision du gouvernement pour assurer la sécurité et la souveraineté alimentaires du Maroc. Face au stress hydrique, l’investissement massif dans la modernisation des systèmes d’irrigation est l’une des clés.

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Le contexte de polycrise dans lequel évolue le monde depuis 3 ans, avec son lot de pénuries et de tensions sur les chaînes de valeur agricoles, a remis au goût du jour les concepts de souveraineté et de sécurité alimentaires. Au Maroc, ils ont été érigés au rang de priorités au plus haut sommet de l’état, et sont au cœur de la stratégie «Génération Green 2020-2030».
Sécurité et souveraineté alimentaires étaient justement au centre d’un riche débat organisé par nos confrères d’Aujourd’hui Le Maroc, en présence des principaux acteurs du secteur agricole. L’occasion pour Mohamed Sadiki, invité de marque de la conférence, de livrer la vision du gouvernement en la matière.

Une vision qui se nourrit des nombreux acquis du Plan Maroc Vert et s’appuie sur une politique agricole claire, déclinée en filières, qui engage l’ensemble des intervenants dans les chaînes de valeurs.

 

S’appuyer sur les acquis du Plan Maroc Vert

Le ministre a pris soin, en préambule de son intervention, de faire la distinction entre les concepts de sécurité et de souveraineté alimentaires : la sécurité alimentaire est un objectif. Elle vise à assurer la disponibilité des produits alimentaires de qualité dans des marchés bien organisés. Mais ce concept ne définit pas comment y parvenir.

La souveraineté alimentaire est justement l’une des voies pour atteindre la sécurité alimentaire, en mettant en parallèle la politique alimentaire d’un pays et sa politique agricole.
Pour réaliser ses ambitions en la matière, le Maroc ne part pas d’une feuille blanche, loin de là. Dans ce domaine, le Maroc a fait des pas de géant cette dernière décennie, grâce aux efforts déployés dans le cadre du Plan Maroc Vert (PMV), dès 2008, a rappelé Sadiki, chiffres à l’appui. «Le Maroc a atteint des taux de couverture des besoins alimentaires parmi les plus élevés dans la région», s’est-il félicité, ajoutant que «nous sommes à un taux de 100% pour les viandes rouges et blanches, le lait, et les fruits et légumes. Nous sommes à 46% pour le sucre et 53% en moyenne pour les céréales».

Pour cette denrée de première nécessité, le contrat-programme signé entre l’Etat et la Fédération interprofessionnelle voit grand, malgré les contraintes liées à la disponibilité de la ressource hydrique. Il est prévu pour cette filière un investissement de 7,1 milliards de dirhams, avec l’objectif de parvenir à une superficie d’un million d’hectares de céréales irrigués d’ici 2030, contre 300.000 hectares actuellement. Un effort sur le stockage, via des subventions revues à la hausse, est également au programme, afin de faire face à l’irrégularité des approvisionnements en cas de crises majeures. «Nous avons une approche de 6 à 8 mois de couverture, mais ce que nous cherchons, quand on regarde la crise que nous avons vécue, c’est de sécuriser 1 à 2 ans de stocks», a fait savoir le ministre.

Pour en revenir au stress hydrique, il est le principal écueil à se dresser devant les ambitions du gouvernement. Pour Rachid Benali, président de la Confédération marocaine de l’agriculture et du développement rural (COMADER), la ressource hydrique est la principale contrainte pour la production. «4,6 milliards de mètres cubes d’eau sont nécessaires pour la production annuelle. Cette année, le secteur agricole s’est contenté de moins de 700 millions de mètres cubes», a-t-il déploré.

L’investissement privé au rendez-vous
Pour Mohamed Sadiki, il faut parvenir à faire beaucoup plus avec le mètre cube d’eau, en investissant massivement dans l’efficacité hydrique et énergétique. L’un des objectifs est d’atteindre 60% de la superficie irriguée en irrigation localisée d’ici 2030. L’investissement mobilisé dans le domaine de l’irrigation est de 40 milliards de dirhams, une somme conséquente à la hauteur du challenge.

La dynamique d’investissement est d’ailleurs l’un des principaux acquis du PMV. Pour Mohamed Sadiki, le secteur agricole est devenu un secteur d’investissement par excellence, où on peut gagner de l’argent, qu’on soit petit ou grand exploitant. «L’agriculture est un secteur d’investissement, ce n’est pas du social», a-t-il martelé. Selon les chiffres présentés par le ministre, l’investissement étatique dans le secteur a culminé à 54 MMDH en 2020, contre 79 milliards d’investissements privés. «Cela veut dire que les investisseurs font confiance au secteur et à sa stratégie. C’est primordial», s’est-il félicité.
Dans ce domaine crucial du financement, le Crédit Agricole du Maroc joue un rôle fondamental. Mohamed Fikrat, président du directoire de la banque, a d’ailleurs mis l’accent sur l’importance du financement dans la construction et la consolidation de la sécurité et la résilience alimentaires.

Selon lui, le financement du monde agricole et l’écosystème agrobusiness représente entre 3 et 4% du produit intérieur brut (PIB), dont 85% de cette quote-part est financée par le Crédit Agricole du Maroc. «Nous proposons une centaine de produits de financement aux agriculteurs, dont plusieurs produits orientés vers la durabilité», a fait savoir Fikrat.
Il faut noter pour finir qu’en parallèle à ces efforts qui produiront leurs effets sur le moyen et long terme, l’Exécutif déploie, sur instructions royales, le nouveau programme de soutien aux agriculteurs, doté d’une enveloppe de 10 milliards de dirhams. «C’est une véritable bouffée d’oxygène pour les agriculteurs», s’est félicité Rachid Benali. Et d’ajouter : «C’est la première fois que nous recevons une aide directement à la production. Jusqu’à aujourd’hui, nous avions des subventions à l’investissement ou à l’exportation, mais jamais aux produits et au financement des intrants».