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Affaires

Vendeur de rêves professionnel

A la mort de son père, Othman Chérif Alami choisit de reprendre l’entreprise familiale, grevée par les impayés, alors que les autres héritiers préfèrent les immeubles, plus lucratifs à  l’époque.
Il innove en 1978 en initiant les premiers voyages organisés en Espagne et les voyages charters.
En vingt ans, il double son chiffre d’affaires et implante l’enseigne Atlas Voyages dans tout le Maroc.

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Othman Cherif Alami est un beau parleur, voire, quelque part, un hâbleur. A l’image des personnes de l’industrie du voyage, les pieds bien ancrés sur terre, vendre du rêve est, chez lui, un réflexe qui surgit dès qu’il est en présence de quelqu’un qui a les moyens de s’en offrir. Il est vrai qu’il a de qui tenir : son défunt père, qui lui a légué à la fois Atlas Voyage et le sens commercial, et qui jouissait du respect de tout le monde, était de la partie. Sa mère, elle, a animé, un moment, le Syndicat d’initiatives et de tourisme de Casablanca. C’est dire que le jeune Othman, né en 1951 à Casablanca, a baigné depuis le départ dans l’ambiance feutrée et quelque peu surréaliste de ceux qui tracent des itinéraires aptes à vous convaincre de prendre un crédit pour aller vous ressourcer à Ouarzazate, Tenerife ou ailleurs.
Ce Bélier qui ne s’estime pas lésé par son signe astral mais qui n’y croit pas, non plus, au point de se précipiter sur son horoscope au saut du lit, a d’abord fait l’école hôtelière de Rabat avant de rejoindre l’Institut du même nom à Tanger. A l’internat, il se fait des amis et apprend l’art de la débrouille. Au gré des stages qui conduisaient les étudiants en Europe, il gagne ses premiers dirhams et se prend déjà à rêver d’être aux commandes des grands hôtels de Paris, Londres et, pourquoi pas, Singapour. Cette idée le séduit tant et si bien qu’il essaie, un temps, de persuader son père de l’inscrire à l’Institut hôtelier de Nice ou dans une école américaine. Rien n’y fit et il dut se contenter de ses diplômes marocains et atterrir comme stagiaire dans l’affaire familiale. Son premier salaire, il s’en souvient : 1 800 DH. A la même époque, c’est-à-dire en 1974, un enseignant de 2e cycle n’en touchait que 800.

Premier salaire, en 1974 : 1 800 DH
Le jeune Othman se souvient de son premier voyage de prospection de clientèle. C’était en 1978, et sa destination était le pays du Soleil Levant. Vinrent plus tard des pays plus proches où il apprend à recruter des clients.
Othman Cherif Alami se frotte donc aux affaires, forge ses premières armes et gagne la confiance de son père qui lui délègue une partie de la gestion de l’agence et même, en partie, la signature. Il organise, grande première, dit-il avec fierté, coup sur coup, les premiers voyages charters et voyages organisés du Maroc vers l’Espagne. C’était entre 1978 et 1980. Deux années plus tard, un terrible événement survient : le père décède à la suite d’une crise cardiaque, alors qu’il n’était âgé que de 57 ans.
Passé le choc, les autres héritiers choisissent les biens immeubles, alors que Othman et son frère Saâd optent pour ce qu’ils considèrent comme la richesse la plus durable, l’entreprise paternelle. L’état des lieux qu’ils effectuent alors est le suivant : deux bureaux à Casablanca, une agence à Marrakech et… beaucoup d’impayés dont une grande partie irrécupérable. M. Alami contracte un crédit de consolidation de 2 MDH et adopte un plan de restructuration de 5 ans qu’il finalisera en fait en trois années.
Othman Cherif Alami se souvient de cette époque : «La mort de mon père a été un événement douloureux en 1981 mais, après son décès, il m’a laissé un capital de confiance et des amis qui m’ont ouvert toutes les portes, qu’il s’agisse des banques, de la RAM ou encore des fournisseurs. Tout le monde m’a accueilli à bras ouverts. A la suite de cela, j’ai eu beaucoup de chance, car j’ai réussi deux grands événements entre 1982 et 1984 : le Congrès de Ford Europe qui s’est tenu à Marrakech au N’fiss, et qui a drainé 1 200 personnes, et le Congrès français d’IBM qui, lui, a amené 3 200 personnes dans la ville ocre, en trois vagues successives. Plus tard, en 1989, il y aura le Congrès médical sur la fertilité et la stérilité, qui comptait 4 200 convives.»
14 agences siglées Atlas Voyages d’ici à 2007
Parti des trois bureaux légués par le père en 1982, Atlas Voyages est passé à la vitesse supérieure. De 30 employés au départ, Atlas Voyages, aujourd’hui tournée vers l’international, emploie un effectif de 185 personnes réparties sur 8 agences. Elle a enregistré quelque 305 MDH en 2002 contre environ 30 millions en 1982. Mais, plus que cela, ce sont les projets d’Othman Cherif Alami qui rassurent sur la santé d’une entreprise qui dépense, aujourd’hui, un million de DH pour la formation du personnel et 4 millions pour la promotion et la prospection. Atlas Voyages compte en effet ouvrir quatre nouvelles agences en 2004, à Tanger, Essaouira, Rabat (une deuxième) et Casablanca (une quatrième). L’objectif, pour 2007, étant d’atteindre 14 bureaux dans le pays et, d’ici là, d’ouvrir le capital aux éventuels investisseurs. En attendant, Atlas Voyages a commencé à filialiser des activités comme le transport ou la gestion hôtelière.
L’autre grand chantier pour Atlas Voyages, qui compte un fichier de 3 000 clients, est naturellement les nouvelles technologies. Un projet de carte fidélité et la vente on line sont dans le pipe