Affaires
Surbooking à Marrakech : des touristes étrangers pourraient porter plainte
Du 20 au 24 avril, certains hôtels ont préféré vendre aux nationaux des chambres déjà réservées par des touristes étrangers.
Une commission d’enquête a été mise sur pied.

Le phénomène est connu dans le secteur hôtelier. Mais, par son ampleur, le surbooking enregistré à Marrakech durant le long week-end du 20 au 24 avril est sans précédent. De mémoire de Marrakchi, jamais la ville n’avait accueilli autant de monde et les 39 000 lits de la cité ont été pris d’assaut. Il faut dire que cette période a coïncidé avec les vacances scolaires en France et la fête du Mawlid au Maroc. Hôtels, résidences, villages de vacances et riads n’auront pas suffi. A tel point que l’on a vu des touristes locaux passer la nuit dans leurs voitures et des étrangers patienter de longues heures dans leurs bus en attendant d’être relogés dans un autre établissement.
De fait, selon des sources bien informées dans le milieu touristique, à la dernière minute, des établissements ont préféré vendre les chambres aux nationaux et laisser sur le perron des dizaines de touristes étrangers, dont les réservations étaient faites depuis de longs mois. Selon un tour-opérateur parisien qui a eu à reloger une trentaine de personnes, cette pratique est motivée par le fait que «les Marocains payent leurs chambres au prix fort et, surtout, au comptant». En effet, Marrakech, qui connaît un afflux sans précédent depuis quelques mois, n’est pas partie prenante à l’opération Kounouz Biladi.
«Nous nous attendons à une avalanche de procès, et les lois européennes, notamment la loi de 1992 qui sert de base juridique dans ce genre de litiges, sont claires. Je ne sais pas si les autorités marocaines vont prendre des sanctions contre ces établissements, mais nous sommes un certain nombre de TO à avoir saisi le CETO (Centre d’études des TO, à Paris)», poursuit le tour-opérateur étranger. Nul doute que le ministre du Tourisme aura son lot de réclamations à gérer. A l’heure où nous mettions sous presse, Adil Douiri n’était pas joignable pour nous en parler.
Une partie des clients a été logée dans des riads
Cela dit, concède un réceptif marocain, le surbooking est pratiqué par tous les hôteliers du monde dans les limites du tolérable, mais il a aussi ses règles, «entre autres, reloger le client dans un établissement de niveau équivalent ou de niveau supérieur, avec, souvent, quelques compensations supplémentaires». De plus, explique cette même personne, «l’hôtelier est tenu d’informer au moins une semaine à l’avance, le T.O. ou l’agence avec laquelle il travaille, de la non-disponibilité du logement réservé pour permettre au client, soit d’annuler, soit de choisir un autre établissement».
Il semble qu’à Marrakech rien n’a été fait dans ce sens, puisqu’une partie de la clientèle restée en rade a même été relogée dans des riads. Et encore, il a fallu l’intervention du wali de Marrakech dont les services étaient les seuls en veille durant le week-end en question.
Selon Abdellatif Kabbaj, président de l’AIH (Association de l’industrie hôtelière), la situation est à ce jour maîtrisée et une commission constituée par la wilaya, la délégation du tourisme et l’AIH devait entamer, dès mardi 26, une enquête pour déterminer les responsabilités de chacun dans le cadre de la loi 61/00 sur le classement des hôtels. Si c’est l’hôtel qui est en infraction, il appartiendra au wali de prendre les sanctions prévues par cette loi, mais si le tort revient à l’agence réceptive, c’est au ministère de tutelle d’agir.
Néanmoins, du côté des professionnels du tourisme dans la ville ocre, on minimise le problème car, affirme-t-on, peu d’établissements se sont livrés à ces dépassements. Reste à savoir comment vont réagir les touristes malmenés. Quoi qu’il en soit, l’image de marque de la destination risque d’en prendre un coup .
Avec ses 39 000 lits, la ville est en situation de sous-capacité par rapport à la demande.
