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Plus de 50 000 tonnes de produits impropres à la consommation saisies en 2015

L’essentiel des saisies portent sur les produits végétaux, les viandes blanches et les abats de viandes rouges. Les contrevenants exercent principalement dans le circuit légal. Faute de moyens suffisants, et parfois pour une question de prérogative, l’ONSSA ne peut quadriller tout le territoire.

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ONSSA

Il n’est pas rare de tomber sur des produits impropres à la consommation sur nos marchés. Des viandes aux intrants agricoles, en passant par les additifs destinés à l’industrie agroalimentaire, les produits de la pêche, les produits laitiers et ceux de la ruche, le problème concerne tout ce qui constitue directement ou indirectement notre alimentation quotidienne. Il se pose avec acuité dans les grandes villes, principalement à Casablanca, Marrakech, Oujda, Agadir, Rabat, Fès et Tanger. Les quantités saisies sont en constante augmentation. On ne sait pas s’il faut imputer cette hausse au renforcement des contrôles ou à la vitalité des fraudeurs, mais d’après les chiffres de l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA), communiqués en exclusivité à La Vie éco, «plus de 50 000 tonnes de produits animaux et végétaux ont été saisies et détruites en 2015».

Sur ce total, les viandes (rouges et blanches) représentent près de 3 775 tonnes, en progression de 50% par rapport à 2014. Les viandes blanches (poulet et dinde) ainsi que les abats de viandes rouges restent les plus touchés par le phénomène puisqu’ils représentent respectivement 53,6% et 36,6% des produits saisis pour non-respect de la chaîne de froid, mauvaises conditions de transport et d’entreposage et, pour certains cas, du fait de l’origine inconnue de la marchandise. Ces saisies ne représentent qu’une infime partie des quantités contrôlées (près de 222 000 tonnes) et de la production nationale de viandes rouges et blanches qui se montait à près d’un million de tonnes en 2014. Il est important de noter que 92% de ces produits impropres à la consommation ont été trouvés dans les abattoirs tandis que le reste était stocké ou exposé dans les points de vente autorisés. En d’autres termes, les contrôles et saisies effectués ont été faits uniquement dans le circuit de production et de vente légale : 182 abattoirs municipaux et un privé, 540 tueries rurales, 22 abattoirs avicoles, 60 000 boucheries et 29 437 points de vente de viandes blanches.

Les services de contrôle effectuent un vrai travail de Sisyphe non seulement parce que les contrevenants reprennent leurs mauvaises habitudes dès qu’ils en ont l’occasion, mais aussi du fait qu’il est matériellement impossible, avec seulement 1700 contrôleurs, d’être présent sur tout le territoire national. Effectivement, un observateur très au fait des pratiques courantes dans le secteur déclare que «l’ONSSA ne peut intervenir que dans les points de vente autorisés, alors que ce n’est pas dans ces lieux que la viande clandestine est commercialisée».

C’est aussi le cas pour les viandes blanches car l’intervention des services de l’office dans les établissements d’abattage avicole n’est pas obligatoire. A Casablanca, c’est seulement lors de sa session de février que le Conseil communal lui a demandé d’y mener des contrôles. De nombreux professionnels sont d’avis que de gros centres d’abattage sont ouverts dans les souks ruraux et dans les marchés installés dans le périmètre urbain. Les quantités transitant par ces endroits sont encore plus importantes que celles commercialisées dans les marchés de gros de volaille. De plus, que ce soit le poulet ou la dinde, les vendeurs ne disposent que d’une patente qui ne renseigne pas précisément sur leur activité. Cela rend le contrôle encore plus compliqué.

Les produits végétaux représentent la plus grande part des aliments saisis

Les produits de la pêche sont aussi très touchés par les pratiques frauduleuses. En 2015, près de 200 tonnes ont été saisies. Motif, «ces produits sont généralement achetés par des grossistes et stockés dans des dépôts dans des conditions qui ne répondent pas aux normes», explique un responsable au sein de l’ONSSA. Il rappelle que, pour des raisons de spéculation, «ces pratiques sont très répandues à l’approche de Ramadan et de la période estivale». Le problème est que la plupart des dépôts de poisson sont installés dans des quartiers résidentiels. Il est donc difficile pour les services de l’ONSSA de les identifier, à moins qu’ils ne reçoivent une réclamation ou une plainte. «Chose rare puisque ces trafiquants choisissent les emplacements avec beaucoup de précaution. De ce fait, nous nous basons principalement sur notre historique», explique le responsable.

L’office a également détruit 46 735 litres de produits laitiers et 3 748 tonnes de produits de la ruche. Ces quantités ont été confisquées dans des épiceries ou des commerces qui exercent en toute légalité, alors que le gros de ces produits échappe à tout contrôle puisqu’il est commercialisé dans le circuit informel.

Les produits végétaux représentent la plus grande part des aliments saisis : 825 tonnes de produits impropres à la consommation ont été repérées sur le marché local et 45 375 tonnes d’aliments, d’additifs et d’intrants agricoles importés refoulées. «Les produits saisis sur le marché local sont en grande partie détectés lors des contrôles de qualité effectués au niveau des chaînes de production», confirme une source à l’ONSSA. Les produits refoulés sont quant à eux remarqués lors des contrôles effectués par la Douane. A ce niveau, certains professionnels déplorent l’absence d’informations sur les causes de l’interdiction de la mise à la consommation, la non-conformité constatée, l’entreprise importatrice ou l’origine du produit. Ils confirment tout de même que le gros des produits végétaux impropres à la consommation passe par des circuits très opaques donc difficilement accessibles.