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Affaires

Les équipementiers dans l’impasse en raison du départ de Fiat

La production de véhicules utilitaires légers par Peugeot et Renault
ne compensera pas les pertes dues au départ de Fiat n Pour la L90, les
acheteurs de Renault invitent les équipementiers à surveiller leur
compétitivité.

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Les temps sont difficiles pour les équipementiers. Ils doivent désormais composer avec l’arrêt, prématuré à leur goût, du montage des véhicules Fiat (Uno, Palio, Sienna) à la Somaca et une mise en place encore timide du projet de Renault qui va construire des voitures de marque Dacia, encore sous le nom de code de L90. Sentant que l’avenir du secteur risque d’être assombri, l’AMICA (Association marocaine de l’industrie et de la construction automobile) a même tenté de pousser les pouvoirs publics à accorder plus d’avantages au constructeur italien pour l’encourager à rester, mais sans succès. Ce baroud d’honneur s’explique par le fait que l’enjeu est important. Par exemple, les commandes de Fiat destinées à la voiture économique représentent, pour les fournisseurs les plus diversifiés en termes de produits et de clients, près de 25 % de leur chiffre d’affaires. Que dire alors de ceux qui se sont installés avec l’arrivée de l’Italien et qui le livrent pour la première monte ou pour l’exportation au titre de la compensation ?
«Nous regrettons l’arrêt du montage à la Somaca de Fiat Auto Maroc, d’autant que nous avons accompli beaucoup d’efforts en termes d’investissement ou encore de formation du personnel dans le cadre du projet de la voiture économique», commente amèrement Ali Moahma, président de l’AMICA.

L’accord signé avec Renault est jugé moins avantageux

Les investissements réalisés par les sous-traitants sont à la fois génériques et spécifiques à des composants automobiles. Et dans certains cas, ceux qui sont destinés à la production de pièces pour Fiat Auto Maroc ne sont pas encore amortis.
Les équipementiers ne sont pas au bout de leur peine. A défaut de pouvoir produire des pièces pour le montage de la marque Fiat ou pour l’exportation dans le cadre de la compensation, ils risquent de garder un stock de matières premières inutilisables. Des discussions seraient engagées avec Fiat pour solutionner ce problème.
Parallèlement, l’AMICA demande à ses membres de continuer à lui fournir les éléments d’appréciation de la situation. L’association tente d’évaluer les pertes subies par le secteur avant d’en discuter avec le ministère du Commerce et de l’Industrie qui a promis une assistance dans cette phase transitoire. Ce département risque toutefois de croiser le fer avec les équipementiers qui soulignent que l’accord conclu avec Renault pour le montage de la L90 s’avère moins avantageux que celui en vigueur avec Fiat. Ils font remarquer que le nouvel accord n’évoque plus les aspects réglementaires de l’intégration locale de composants automobiles ou de l’exportation dans le cadre de la compensation. Pour un professionnel, le secteur est dans l’incertitude, tout simplement parce que les commandes de Renault pour la voiture familiale pourraient s’avérer insuffisantes. Certes, la convention signée avec le constructeur français impose un volume minimum d’exportation de 15 000 unités par an. Du coup, dans le cas où les exportations seraient dirigées vers des pays avec lesquels le Maroc a signé ou est en phase de signer des accords de libre-échange, notamment la Tunisie, l’Egypte ou la Jordanie, Renault sera tenu de produire 40 % de la valeur ajoutée dans le pays d’origine, c’est-à-dire le Maroc.
Mais il est à signaler que cette intégration ne comprend pas seulement les composants automobiles des équipementiers locaux, elle intègre également les coûts de montage à la Somaca. Ainsi, le niveau obligatoire d’intégration des pièces de la sous-traitance sera larement inférieur à 40 %.
D’ailleurs, les responsables achats de Renault ont déjà annoncé la couleur aux équipementiers marocains. Ils leur ont suggéré d’être plus compétitifs en réduisant leurs coûts de production et leurs marges en vue de disposer en final d’un véhicule commercialisé à près de 70 000 DH au Maroc.

La Somaca se prépare à vivre deux années difficiles
En attendant, la grande question porte sur la gestion de la phase transitoire, les deux ans qui séparent le départ de Fiat et le début de la production de la L90. On sait déjà que la Somaca verra sa production chuter de 50 %. Les professionnels pensent que Renault et Peugeot ne pourront produire que 3 000 à 4 000 unités de la version quatre portes des véhicules utilitaires légers (VUL), contre 8 000 véhicules perdus en raison du départ de Fiat.
La chaîne de montage connaîtra sans nul doute une nouvelle période de crise qui pourrait se traduire par des départs anticipés à la retraite ou probablement par du chômage technique. «Ce sera d’autant plus difficile que l’entreprise est en phase de préparation d’un nouveau projet industriel», commente un professionnel.
Autre perdant dans cette affaire : les concessionnaires de Fiat, notamment ceux qui ont beaucoup investi dans la marque. Ils ne se sont pas fait prier pour exprimer leur mécontentement. Pour calmer le jeu, Fiat Auto Maroc a expliqué qu’elle compte toujours demeurer au Maroc avec l’importation des CBU. Mais ce sera insuffisant pour la clientèle des véhicules Uno et Palio (les taxis et les sociétés de location en l’occurrence), dont le prix d’acquisition varie entre 75 000 et 100 000 DH