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Les armateurs menacent de mettre leur personnel en chômage technique

Malgré le départ de la flotte européenne, les ressources halieutiques continuent de s’amenuiser et les arrêts biologiques suivent n Les entreprise de pêche hauturière ne travaillent plus que 4 mois par an et certaines craignent pour leur survie.

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Le secteur de la pêche hauturière navigue en eaux troubles. La décision du ministère des Pêches maritimes de prolonger de deux mois la période de repos biologique, jusqu’au 31 décembre 2003, a aggravé la situation des professionnels. Ces derniers mettent la pression sur le département de tutelle pour que la décision soit revue. Mais Tayeb Rahfes, ministre des Pêches maritimes, reste stoïque. «Nous avons pris cette mesure suite au rapport scientifique de l’INRH qui a conclu que la ressource halieutique connaît une situation critique qui frôle l’effondrement», explique-t-il.

Nous n’avons pas été associés à la décision
Les professionnels de la pêche hauturière sont conscients de la faiblesse des ressources. Ils s’en sont rendu compte, lors de la dernière marée qui a connu les plus mauvais résultats. Les prises de poulpes n’ont été que de 6000 tonnes, alors que les chalutiers de la pêche hauturière sont autorisés à en capturer 20 000 tonnes par marée. Malgré cela, les armateurs sont mécontents. L’arrêt biologique n’est donc pas le seul problème à l’origine de leur colère. Tout d’abord, ils ne l’ont pas apprécié dans sa forme car ils n’y ont pas été associés. Selon eux, le ministère n’est pas habilité à prendre de décision ayant des conséquences sur l’activité du secteur sans consulter les Chambres maritimes pour avis conformément aux textes législatifs.
De plus, les professionnels estiment que «le rallongement des délais de repos biologique est une solution de facilité». Selon eux, les autorités de tutelle devraient plutôt s’attaquer aux causes profondes de cette raréfaction de la ressource qui résident dans l’importance de l’effort de pêche (nombre de bateaux pêchant le poulpe) et dans la faiblesse du contrôle à terre et en mer. Pour eux, le départ de la flotte européenne a été plus que compensé par les bateaux de la pêche artisanale et côtière. En chiffres, les prises de la flotte étrangère avaient, à la veille de son départ, en 1999, totalisé à
peine 15 000 tonnes de céphalopodes, alors que les nouveaux arrivants sur le marché du poulpe avaient pêché 52 000 tonnes, une année plus tard.
L’effort de pêche a augmenté ces dernières années
«Malgré la sonnette d’alarme tirée par l’INRH (Institut nationale de recherche halieutique) depuis 1992, sur les risques pesant sur les ressources halieutiques des céphalopodes et le gel des investissements pour la pêche hauturière, le nombre de bateaux pêchant cette espèce n’a cessé d’augmenter», avancent les armateurs. De plus, «les autorisations accordées aux barques de la pêche artisanale atteignent 14 000 tonnes, par défaut de contrôle», précisent-ils.
Par ailleurs, les professionnels considèrent que des solutions autres que l’arrêt pur et simple auraient pu être imaginées. Par exemple, ils constatent qu’à la fin d’une période d’arrêt biologique, tous les intervenants dans le secteur débutent en même temps leur activité, ce qui épuise la ressource. Ils estiment que des départs échelonnés des bateaux préserverait mieux la ressource. Enfin, «nous ne voyons pas le bout du tunnel», répètent les professionnels car depuis l’instauration des repos biologiques au début des années 1990, la situation ne s’est pas améliorée, tout au contraire elle ne fait qu’empirer avec des conséquences sur la situation financière des entreprises. Des professionnels avouent qu’ils ont déjà diminué de 20 à 30% le nombre de personnel employé. L’idée de décréter un chômage technique pour l’ensemble des emplois à bord et à terre fait son chemin. «Nous ne pouvons pas continuer à remplir nos engagements envers les fournisseurs et les banquiers si nous ne travaillons que quatre mois sur douze dans l’année». L’investissement pour l’acquisition d’un chalutier de la pêche hauturière est de l’ordre de 25 à 30 millions de DH et le coût d’immobilisation d’un chalutier «à quai» est de 2 000 dollars (20 000 DH) par jour. Mais, d’autre part, il faut bien préserver la ressource ! Alors quelle solution trouvera-t-on?