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Affaires

Le déficit serait de 6 % en 2004 !

Les dépenses de l’Etat seront alourdies par l’impact des accords sociaux
et des retraites anticipées.
Le taux de croissance : 3 % seulement.
L’inflation serait contenue à 2%.
Mais la lettre de cadrage qui fixe les orientations de la loi de finances n’est
toujours pas prête.

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La lettre de cadrage, qui fixe les grandes orientations de la Loi de finances à venir, tarde à voir le jour. Habituellement, ce texte, confectionné par la Primature, parvient aux différents départements ministériels (en vue de préparer leurs budgets respectifs) en mai-juin de l’année en cours.

Jettou s’implique dans la préparation du budget
Ce retard, certains l’imputent à la «nouvelle démarche», désormais en vigueur pour l’élaboration de la Loi de finances et dans laquelle le Premier ministre, dit-on, est impliqué personnellement. D’autres y voient la conséquence des «divergences» apparues, il y a quelques semaines, à propos notamment du taux de croissance réalisé en 2002. Les deux explications se rejoignent en fait : si le Premier ministre a décidé de prendre lui-même en charge la préparation du Budget, c’est sans doute pour mieux coordonner le processus et poser des prévisions plus en rapport avec les objectifs de la nouvelle politique gouvernementale et les moyens mis en œuvre pour sa réalisation.
Un autre élément – mais directement lié à ce qui précède – est probablement à prendre en considération dans l’explication de ce retard : la réussite exceptionnelle de l’opération de cession de 80 % du capital de la Régie des tabacs, dont le chèque (14 milliards de dirhams) vient juste d’être remis par l’acquéreur, Altadis, au gouvernement marocain. Cette recette, évidemment, aura un impact positif, non seulement sur la loi de finances en cours, mais aussi par une sorte d’effet d’entraînement, sur la prochaine – en termes de déficit, notamment, et donc de financement de celui-ci.
En d’autres termes, les prévisions pour 2003, qui tablaient sur des recettes de privatisations ne dépassant pas les 12,5 milliards de DH et un taux de croissance de 4,5 %, devraient subir quelques modifications, lesquelles ne manqueront pas d’impacter la croissance en 2004.
Il y a un mois, le Centre marocain de conjoncture (CMC), tenant compte de la bonne récolte céréalière et de l’achèvement, plus tôt que prévu, de la guerre contre l’Irak, avait annoncé la couleur, en révisant à la hausse sa prévision de croissance pour l’année 2003 : 7,4 % au lieu des 6 % prévus initialement. De son côté, la DPEG (direction de la Politique économique générale, du ministère des Finances), légèrement moins optimiste que le CMC, table, dans son dernier bulletin de conjoncture, sur une progression du PIB en 2003 de 5,5%.
«Vous le voyez, la conjoncture a beaucoup fluctué cette année, et cela nous oblige à revoir nos chiffres, à les affiner tant en ce qui concerne l’exercice en cours que le prochain», confie une source à Rabat.
Selon les premiers éléments qui ont filtré des discussions en cours autour du budget 2004, le taux de croissance serait de 3 % en termes réels ; soit un point de moins que la prévision du CMC (4 %). L’inflation, elle, serait de l’ordre de 2%. «C’est normal: quand on a réalisé une bonne année, comme c’est le cas en 2003, celle qui suit enregistre souvent une croissance moindre. C’est l’effet cyclique de la croissance», explique un économiste. Evidemment, et il faut insister là-dessus, il s’agit là d’une prévision, et comme telle, celle-ci peut se réaliser ou ne pas se réaliser. Beaucoup estiment cependant que le programme volontariste du gouvernement Jettou, en particulier les chantiers de mise à niveau et les actions d’accompagnement du secteur privé, déjà initiés (voir les détails dans le dossier consacré à ce sujet dans La Vie éco du 11 au 17 juillet 2003), sont de nature à décrisper la machine, à faire retrouver la confiance aux opérateurs, et donc à dynamiser l’activité économique. Surtout si, comme le prévoit le CMC, l’économie mondiale reprend de la vigueur (3,5 % de croissance) et le commerce international progresse (6,5 %), toutes choses de nature à améliorer la demande étrangère adressée au Maroc.

L’accord social pèsera sur les finances publiques
Pour autant, et selon les première estimations, le déficit en 2004 serait sensiblement élevé. On parle de plus de 6 %, un chiffre à prendre néanmoins avec beaucoup de précautions. Bien sûr, ce taux s’entend hors privatisations, mais même en comptant ces dernières, le niveau du déficit ne devrait pas s’améliorer sensiblement. D’abord, parce que, en 2004, les cessions programmées ne devraient pas rapporter des sommes astronomiques : la cession des 16 % de Maroc Telecom reste tributaire du marché mondial, et celle d’une part de la BCP (la privatisation de cette banque présentant un caractère un peu particulier) ne devrait pas peser aussi lourd qu’on le voudrait. Ensuite, et malgré la volonté de les comprimer, les dépenses pourraient s’alourdir en raison, entre autres, des engagements pris dans le Dialogue social.
Même si la revalorisation des salaires, par un effet de rattrapage, pourraient «booster» les recettes de l’IGR, il ne faut pas oublier que le taux plafond de ce dernier baissera de 44% à 41,5%. Autre facteur d’alourdissement : la mise en œuvre du programme de départ en retraite anticipée (par contingent de 20 000 par an), dont le coût global, selon une estimation qui date un peu il est vrai, serait de 2 milliards de dirhams.

Quid alors des recettes (fiscales et non fiscales) ? Certains prédisent leur tassement, mais cela sera-t-il vraiment le cas ?