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Le business des studios d’enregistrement en plein développement
Les stars de la chanson arabe affluent grâce aux équipements de dernière génération et aux tarifs très compétitifs. Les studios marocains concurrencent désormais ceux de l’Egypte et du Liban. Pour le moment, les habillages sonores, la musique libre de droit, les voix off pour les spots radios, les pubs télés et les musiques de films rapportent près de 80% des recettes.

Les studios d’enregistrement fleurissent au Maroc. Il s’agit d’une réelle industrie artistique qui se construit, positionnant le Royaume comme leader dans la région et un redoutable concurrent de l’Egypte et du Liban, pays réputés par leurs studios et leur savoir-faire dans le domaine. En effet, l’enregistrement des chansons au Maroc est devenu une mode. A l’origine de cette tendance, il y a «les jeunes stars marocaines ayant brillé au Moyen-Orient et réussi à exporter notre culture musicale», explique Jamal Abdenasser, DG de Hiba Studio. Pour répondre à cette demande croissante, plusieurs artistes et même des profanes de la musique ont investi dans des studios de dernière génération. Depuis 2010, on a vu naître Africa Production, DBF, Zawya, Studio Coda, Hiba studio…
Ces nouveaux studios disposent des meilleures solutions technologiques en la matière et offrent des services annexes en audiovisuel et graphisme. A cela s’ajoutent des espaces d’enregistrement, des salles de régie-son, de répétitions, des bureaux de production artistique et des ateliers de montage vidéo. «Studio Hiba dispose également d’une résidence pour les artistes et leurs accompagnateurs afin de les aider à mieux se concentrer sur leurs projets», souligne le DG. «Le budget d’investissement initial peut démarrer à 1 MDH et atteindre les 20 millions pour un studio complet», confirme Taoufik Hazib, alias Bigg, fondateur de DBF. Selon lui, l’investissement se fait de manière permanente pour offrir aux clients du matériel de dernière technologie tel que celui disponible dans les studios du Moyen-Orient. Taoufik Hazib explique que pour lancer son projet, il a investi 2 MDH au départ. Le coût de l’aménagement est élevé puisqu’un studio nécessite au minimum trois couches d’isolation acoustique, un aménagement spécifique et du matériel coûteux. En guise d’exemple, «le prix du micro professionnel basic démarre à 40 000 DH et peut dépasser les 300 000 DH», confirme Hamza Gharchaoui, fondateur de Africa Studio à Tanger.
Les prix d’enregistrement inférieurs de 30% par rapport au Moyen-Orient
Ces studios d’enregistrement sont sous la tutelle du ministère de la culture, mais ils ne bénéficient d’aucune subvention à l’investissement ni au fonctionnement. Malgré tout et même si leurs tarifs sont écrasés, ils s’en sortent très bien. Une séance d’enregistrement est facturée en moyenne 6 000 DH HT. Ce prix est majoré en fonction du type de la prestation. A titre d’exemple, «l’enregistrement d’un tube, réalisé sur trois séances, y compris la prestation du technicien et de l’ingénieur, revient en moyenne à 20 000 DH», indique le fondateur de Africa studio. A DBF, «c’est du cas par cas. L’enregistrement d’un tube nécessite 3 séances, soit 18 000DH», explique M. Hazib. Chez Hiba studio, la séance est facturé 7 000 DH. Ce prix peut être réduit de moitié au cas où la durée d’enregistrement dépasse les 10 jours. En somme, ces studios restent très compétitifs, même s’ils sont équipés de matériel dernier cri. «On est moins cher de 30% par rapport aux pays leaders dans le domaine, en l’occurrence l’Egypte et le Liban», déclare Jamal Abdenasser de Studio Hiba. Le hic, la promotion à l’international fait encore défaut.
La formation et la promotion à l’international restent les maillons faibles de cette industrie
Mohammed Abdou, Maher Zain, Jamila, Mona Amarcha…, la liste des stars arabes ayant enregistré leurs chansons au Maroc est longue. «Aujourd’hui, il y a même des chanteurs algériens et tunisiens qui préfèrent enregistrer au Maroc au lieu de se déplacer en Europe ou au Moyen-Orient», se félicite Hamza Gharchaoui. Cependant, bien que le Maroc se positionne comme une alternative dans la région, le nombre d’enregistrements de chansons reste très faible. Et pour cause, «les artistes marocains qui doivent être la base de cette industrie ne font pas beaucoup de sorties d’albums», regrette Hazib qui ajoute que la promotion et la prospection dans le domaine s’appuient principalement sur le bouche-à-oreille. Autrement dit, «c’est soit le propriétaire du studio qui est dans la plupart des cas un artiste qui fait jouer ses relations pour faire de la prospection, soit ce sont ses connaissances et les artistes qui ont enregistré chez lui qui lui font de la publicité», ajoute le professionnel. A ceux-là s’ajoutent les managers d’artistes ainsi que les intermédiaires qui jouent le rôle de prescripteurs.
A l’évidence, les studios n’optent pas encore pour une démarche de prospection commerciale à l’international. De son côté, Jamal Abdenasser confirme que le problème ne se pose pas au niveau de la démarche commerciale, mais plutôt dans le fait que le pays est très en retard au niveau des métiers relatifs à ce domaine, à savoir les ingénieurs et les techniciens.
On peut dire que le secteur d’enregistrement se développe au Maroc, mais ces établissements souffrent encore des faiblesses de la production artistique locale. En attendant que le vent tourne du bon côté, les studios d’enregistrement comptent pour le moment sur les revenus générés par les habillages sonores, la musique libre de droit, les voix off pour les spots radios, les pubs télés, et les musiques de films pour doper leur chiffre d’affaires et amortir leurs investissements puisqu’ils représentent près de 80% des recettes.
