SUIVEZ-NOUS

Affaires

Dépôts MRE : un arrangement à  l’amiable serait en bonne voie

Les banques se disent prêtes à payer à condition que le fisc
fasse des concessions.
Selon la Primature, l’issue sera trouvée avant septembre prochain.

Publié le


Mis à jour le

Lelitige qui oppose depuis deux ans trois banques de la place à la Direction des Impôts, au sujet de la retenue à la source sur les dépôts MRE, s’acheminerait-il vers une issue négociée ? Il semble bien que oui. En effet, du côté des banques concernées, c’est-à-dire la BCP, Wafabank et Crédit du Maroc, comme de la Primature, on penche pour une solution à l’amiable.

En janvier 2003, l’exonération enfin décidée
Il était temps. La BCP se prépare à entrer en Bourse en octobre prochain. Or, comment imaginer qu’une banque soit attrayante avec un risque fiscal de près de 1 milliard de DH ? De leur côté, Wafabank et Crédit du Maroc avaient intenté, en avril dernier, une action judiciaire à l’encontre de la Direction des Impôts. Motif du quiproquo, le fisc demande aux banques de s’acquitter d’une retenue à la source qu’elles auraient dû opérer sur les intérêts servis aux MRE au titre de leurs dépôts.
Flash-back. A la suite d’un contrôle effectué en 2001, le fisc avait notifié un redressement aux trois établissements à qui il reprochait de ne pas avoir opéré ladite retenue. La direction des Impôts s’appuie pour cela sur les articles 10 et 19 de la loi 17-89 relative à l’IGR. Les banques, elles, contestent la décision en avançant que ces intérêts ne doivent pas être taxés à la source car ils ne peuvent être considérés comme revenus professionnels ainsi que le stipulent les articles invoqués par le fisc. Toujours est-il que ce dernier n’a pas attendu pour sommer les banques de payer en leur envoyant les rôles. Le verdict était particulièrement lourd pour la BCP qui s’est retrouvée redevable de 800 millions de DH contre seulement 100 millions de DH environ pour Wafabank et CDM. Un long bras de fer venait de commencer, mais les parties n’ont jamais fermé les portes du dialogue.
Ainsi, Abdelhamid Mrabet, Secrétaire général de Wafabank, explique que «ce blocage n’étant dans l’intérêt de personne, on se dirigera certainement vers un arrangement où chaque partie devra faire quelques concessions». Et, vraisemblablement, les banques seraient prêtes à payer une partie si le fisc se montre plus souple. Dans la foulée, et «pour éviter, disent-ils, la catastrophe», les banquiers se disent même prêts à ne pas répercuter les sommes payées sur leurs clients MRE. En revanche, ils ne feront pas de même si le fisc exige la totalité des sommes. Du côté du GPBM, on est moins bavard. Contacté, Hadi Chaibaâïnou, le directeur délégué, se contente d’une réponse laconique : «Nous sommes en concertations».
Du côté du fisc, on n’a pas encore annoncé la couleur. En effet, en s’adossant aux articles 10 et 19 de la loi, le fisc considère que les intérêts perçus par les MRE sont des revenus professionnels. Nos multiples tentatives de joindre les responsables des impôts se sont avérées infructueuses; peut-être ont-ils préféré ne pas s’exprimer sur une affaire qui est devant la Justice. Cela dit, la note circulaire 712 relative aux dispositions fiscales de la loi de Finances (LF) 2003 consacre une section de trois pages au sujet. Il y est expliqué que «les intérêts versés à des personnes physiques non résidentes étaient imposables en vertu du Dahir de 1959 sur l’impôt sur les bénéfices (IBP) (ndlr : ancêtre de l’IGR)» sachant qu’en 1979 la LF avait institué une retenue à la source de 10% sur les intérêts des placements à revenu fixe sans aucune exonération. En 1990, cette disposition a été insérée à l’identique dans la catégorie des revenus professionnels prévue par la loi 17-89 sur l’IGR. Et depuis, les intérêts servis aux MRE sur les dépôts en dirhams ordinaires sont tombés sous le coup de l’impôt, contrairement aux dépôts en devises ou en dirhams convertibles exonérés par la loi de finances de 1982.

Les hésitations des Finances
Plus récemment en décembre 2002, la loi de finances 2003 a introduit une disposition portant sur l’exonération des MRE de cette retenue à la source. Une exonération que les banquiers ne peuvent qu’applaudir et qui vient implicitement renforcer le bien-fondé de la position de la Direction des impôts au sujet des exercices précédents. Quid alors du passé et ce d’autant que la vérification fiscale opérée en 2001 portait sur les 4 derniers exercices (1997, 1998, 1999, 2000) ? Pire, les comptes de 2001 et 2002 n’ont pas encore été passés au crible !
Les banquiers fondent maintenant leurs espoirs sur l’intervention du Premier ministre et du ministre des Finances. Ce dernier avait d’ailleurs promis à la BCP, en 2002, qu’elle ne paierait que le principal, soit 480 millions DH, les Impôts devant abandonner quelque 300 millions DH au titre des pénalités et majorations de retard. A la surprise générale, la même banque reçut, quelques jours après, un rôle la sommant de passer à la caisse pour la totalité de la somme. Ce n’est pas le seul atermoiement de la part du ministère des Finances. Entre 2001 et fin 2002, à la question posée par les banques de savoir s’il fallait oui ou non opérer dorénavant cette retenue, on leur répondait invariablement «surtout pas!». En d’autres termes, l’exonération n’ayant eu lieu qu’en janvier 2003, les banques doivent-elles payer en lieu et place de leurs clients ?
Avec tout cela, une question se pose. Il y a bien eu des contrôles fiscaux avant 2001, pourquoi le problème n’avait-il jamais été soulevé ? De deux choses l’une alors : soit que les prédécesseurs de Noureddine Bensouda, qui, lui, n’a fait qu’interpréter un texte de loi, n’ont pas fait leur travail, soit que ce silence, qui a duré plusieurs années, était tout simplement volontaire.
Ce qui est sûr aujourd’hui c’est que, lassées de ce bras de fer, les parties sont plus ou moins disposées à tourner la page. Volonté confirmée auprès de la Primature où l’on affirme qu’une solution sera trouvée d’ici à septembre prochain. Reste à savoir comment le différend sera-t-il réglé, financièrement.