Affaires
Dans le dédale de la Zone franche
Sur les 116 sociétés autorisées à s’installer, 47 ont déjà démarré leur activité.
60 % des 130 ha de la première tranche commercialisés.
Quelque 10 000 emplois ont été créés à fin juillet 2003.
Le total des investissements en construction et en équipements effectués par les entreprises autorisées atteindra 2,2 milliards de DH.

Oùen est la Zone franche de Tanger ? A TFZ (Tanger free zone), comme on l’appelle, aujourd’hui, sur les 116 entreprises qui ont obtenu l’autorisation d’exercer, 47 sont déjà en activité. Sur le reste, 26 sont en train de construire leurs locaux, 17 sont autorisées à le faire et 26 ont soumis leurs plans à l’étude.
«En gros, nous avons, à ce jour, vendu 60 % des 130 ha de la première tranche et les 116 entités sélectionnées entreront toutes en phase de production d’ici à la mi-2004 . Notre objectif est d’attirer au total 1 000 entreprises pour faire le plein des 340 ha que compte la zone, d’ici à 2006», explique le DG de TFZ, Jamal Mikou, fraîchement nommé par l’ONA à la tête de la société gestionnaire de la zone.
Avec l’installation des 116 sociétés autorisées, le total des investissements attendus (entre constructions et équipements) devrait atteindre 2,2 milliards de DH. Le nombre d’emplois atteindra 18 000, selon les prévisions. Aujourd’hui, quelque 10 000 personnes travaillent sur les lieux. Ce qui est l’équivalent de la population d’une petite ville. TFZ y a délégué surveillance et hygiène pour se concentrer sur sa mission de guichet unique et sur la promotion et la vente de la zone valorisée.
Et que trouve-t-on dans cette zone hors du commun? Un peu de tout. A TFZ, on fabrique aussi bien du câblage électronique que des chaussures et même des gilets pare-balles, domaine exploité par une famille syrienne installée depuis longtemps à Tanger.
Les délocalisations continuent, TFZ en profite
Statistiquement, les secteurs d’activités représentés sont les industries métallurgiques, électriques, électroniques et mécaniques (46%), les services (27 %), textiles et cuir (17 %), chimie et parachimie (6 %) et l’agro-industrie (1 %).
Les investisseurs ont cependant des réticences à divulguer chiffres et projets et l’on peut comprendre que leur choix de s’installer dans une zone franche s’explique, en partie, par la possibilité de garder secrètes les informations stratégiques pour être compétitifs et surprendre la concurrence.
Parmi les premières grosses pointures présentes sur ce site figure le géant Yazaki qui projette d’investir, au total, 400 MDH dans le câblage automobile. Aujourd’hui, l’effectif de cette entreprise est de 1 300 personnes et devrait arriver à terme en 2011. Elle n’est pas la seule sur ce créneau. Volkswagen, qui emploie 2 000 personnes, compte en recruter 1 000 autres grâce à un plan de délocalisation au Maroc de ses activités européennes. Pour sa part, Lear automotive compte mettre 200 MDH dans la fabrication des câblages électriques qu’elle destine à l’Espagne et à la France.
Il y a également Polydesign, spécialiste des produits textiles pour automobiles, qui compte investir 7 millions de dollars et qui, au départ, a créé 225 emplois avec un objectif de 600 à terme. Sans parler du Français Souriau, qui a délocalisé de Hongrie son activité de fabrication de composants électroniques et qui emploie 130 personnes.
Cette entreprise produit 5 000 connecteurs par jour, destinés aussi bien aux avionneurs (Airbus notamment), aux équipementiers militaires et aux entreprises chargées des programmes de lancement de satellites… Quand il aura libéré la totalité des 14 MDH qu’il veut consacrer à son unité de TFZ, sa capacité de production aura doublé.
Comme d’autres investisseurs, Souriau a préféré louer l’espace de 1 650 m2 qu’il occupe. En effet, des entrepreneurs marocains, quatre au total, offrent des locaux clés en main pour les groupes qui choisissent d’opter pour un bail de manière systématique au lieu d’investir dans l’immobilier.
Un autre investisseur, l’espagnol Solano Atlantic, arrivé il y a peine une année, est déjà en train d’opérer une extension sur 3 000 m2, en plus des 12 000 m2 qu’il occupe. Il était venu pour fabriquer des semelles, avec l’intention de les exporter vers son unité de produits finis. Aujourd’hui, il envisage de concevoir un produit avec le label made in Morocco et a commencé à fabriquer des chaussures de montagne, projet qui n’entrait pas dans ses ambitions initiales, et dont il a découvert le marché après son installation.
A terme, 60 000 emplois seront créés dans la zone
Mais TFZ n’est pas seulement une zone de production. Dans le lot des unités installées, beaucoup font des affaires et lorgnent la sous-traitance, surtout que la zone industrielle, grande aubaine, n’est séparée de la zone franche que par la route nationale. Frédéric Bodin, directeur de la filiale de Souriau est plein d’espoir de ce côté. «Aujourd’hui, nous recourons aux services de notre groupe en France et ailleurs pour des réparations et certaines prestations. Imaginez les gains de temps et les marges que nous pourrions réaliser si nous pouvions nous appuyer sur des partenaires locaux. Nous sommes en train de tester ces possibilités. Nous avons d’ailleurs déjà commencé, en confiant la réparation d’une carte à une société marocaine, mais il nous faut des garanties pour enclencher cette dynamique, car dans le domaine où nous sommes positionnés nous n’avons pas droit à l’erreur».
Bref, il semble que TFZ soit sur un bon trend. Jamal Mikou, lui, est confiant : «Comme pour toute zone franche, le Maroc peut s’attendre à des retombées à plusieurs niveaux : création d’emplois, bien sûr – 60 000 emplois quand on aura fait le plein – mais aussi renforcement de la balance commerciale par l’apport en devises, contribution à une meilleure intégration interindustrielle par une accélération de la compétitivité de notre industrie et de notre économie, en général, qui va se frotter aux multinationales, installées à la TFZ. Autres apports non négligeables attendus de cette zone : non seulement la main-d’œuvre n’aura plus à migrer vers d’autres régions, mais on assistera à un relèvement progressif de ses compétences. Et, à ce propos, l’Office de la formation (OFPPT)envisage d’investir les lieux pour offrir ses services aux entreprises qui ne demandent pas mieux».
Transport : le casse-tête du personnel
La dynamique d’implantation des entreprises est si bien entamée que les sociétés installées, en «copropriétaires» avisés, ont constitué leur syndic (Association des investisseurs de la zone franche) et ont déjà demandé et obtenu de rencontrer des responsables de départements pour exposer certains de leurs problèmes. A quoi se résument-ils ? Essentiellement, il s’agit de problèmes de transport pour leur personnel car la zone reste relativement isolée. Et même le personnel qui se rabat sur un service de transport encore défaillant est obligé de marcher longuement entre l’entrée de la zone et leurs lieux de travail, disséminés sur les 130 ha de la première tranche de TFZ.
Le deuxième problème dont se plaignent les investisseurs de la zone franche est l’impossibilité de procéder au groupage du transport de produits importés (non soumis à la taxation) et des produits destinés au marché local. A TFZ, on s’achemine vers la mise en place d’un espace, à l’entrée de la zone, où les services de la Douane pourront se livrer à loisir aux contrôles exigés pour éviter les fraudes possibles, de manière à ce que les produits fabriqués à la TFZ ne viennent pas inonder le marché local, comme l’interdit la loi.
Au-delà de ces problèmes qu’à TFZ on estime tout à fait surmontables, ce qui rassure Jamal Mikou c’est l’écoute des pouvoirs publics. En effet, pour lui, chaque administration et jusqu’aux opérateurs comme ceux en charge de la téléphonie ou encore du raccordement au réseau électrique ou de l’eau potable, ont mis en place des services dédiés pour une réactivité maximale aux doléances des investisseurs qui ont choisi la zone franche tangéroise
