Carrière
«Le jeûne n’est pas nécessairement synonyme de baisse de performance»
Réorganisation de la journée de travail, fixation d’objectifs spécifiques assortis de primes spéciales, mobilisation spéciale des managers de proximité ou encore organisation d’activités de cohésion, le Groupe Crédit Agricole du Maroc met en place des mesures spéciales pour ce mois sacré. La baisse de la productivité découle souvent d’une baisse de l’activité générale au niveau national et surtout de celles des entreprises.

Pour un groupe comme le Crédit Agricole du Maroc, le mois sacré est synonyme d’activités et d’actions stimulantes, physiques et spirituelles pour maintenir l’assiduité, l’engagement et le niveau de rendement souhaité. Explications avec Meriem Idrissi Kaitouni, Directeur Général Adjoint en charge du Domaine Capital Humain et de La RSE du Groupe CAM.
La baisse de régime pendant le mois sacré, est-ce une réalité ou une perception ?
La simple observation du comportement des collaborateurs pendant le mois sacré peut pousser à conclure que la baisse de régime est plus une réalité qu’elle ne relève d’une impression : relâchement du dynamisme et de l’enthousiasme, nervosité, peu de disposition au partage et à l’effort sont visibles à l’œil nu, comme cela se voit par exemple dans les réunions. Le manque d’excitant et d’énergie, le dérèglement de l’horloge biologique et, de manière générale, le changement de mode de vie seraient à l’origine d’une baisse de régime.
Cependant, les quelques études consacrées à la relation entre jeûne et travail révèlent des résultats contrastés. On a même pu mettre en évidence l’existence d’une catégorie de personnes qui s’évertuent à se montrer très productives pendant Ramadan, au cours duquel elles se sentent plus légères et plus opérationnelles.
Ainsi, en l’absence d’études scientifiques et de statistiques officielles sur la baisse de productivité pendant Ramadan, il semble peu prudent d’affirmer que la baisse de régime durant le mois sacré est une réalité irréfutable pour l’ensemble des salariés.
Il arrive quand même qu’il y ait une baisse de la productivité. Quelles peuvent en être les raisons ?
Intuitivement, il est possible de conclure à une baisse de productivité du personnel pendant le mois de Ramadan, même s’il est difficile de mesurer cette baisse pour une série de considérations, notamment d’ordre religieux.
Pour une institution comme la nôtre, la baisse de la productivité découle d’abord d’une baisse de l’activité générale au niveau national et surtout de celles des entreprises en ce mois-là.
Sur le plan quantitatif, la baisse de productivité est liée individuellement à la baisse du temps de travail à cause notamment de la réduction des horaires de travail, des délais d’activité plus courts, de la nonchalance, des départs avant l’heure, des congés de maladie…
Sur le plan qualitatif, nul ne peut nier les effets sur le rendement du changement sensible du mode de vie, du manque de sommeil, de glucides, de caféine et éventuellement de nicotine.
Peut-on mesurer cette baisse ?
Les études susmentionnées avancent une baisse de productivité allant de 25 à 75% chez les personnes affectées par cette baisse de régime liée au jeûne.
Dans le secteur bancaire, il n’y a pas, à ce jour, de mesure de la baisse de productivité au cours du mois de ramadan.
Cependant, du fait du seul facteur des horaires de travail revus à la baisse (6 heures par jour au lieu de 8h 30 normalement), la baisse de rendement du personnel bancaire peut être estimée à 18%, toutes choses étant égales par ailleurs.
Comment vous organisez-vous pendant ce mois de Ramadan ?
Le jeûne n’étant pas nécessairement synonyme de baisse de performance, un responsable peut, sur le plan personnel, gérer les contraintes ci-dessus par une meilleure organisation de sa journée en programmant, par exemple, les activités les plus importantes durant la matinée avant que la fatigue et les effets du jeûne ne commencent à se faire sentir.
Une autre possibilité consiste à compenser la baisse des heures de travail et du rendement en travaillant depuis chez soi le soir.
En dehors des aménagements du temps de travail, quelles autres solutions peut-on apporter pour améliorer l’organisation quotidienne ?
Outre les aménagements du temps de travail, plusieurs mesures peuvent être mises en place pour maintenir l’assiduité, l’engagement et le niveau de rendement permettant d’assurer à la clientèle la qualité de service à laquelle elle a droit tout au long de l’année :
• réorganisation de la journée de travail en commençant par les activités les plus exigeantes en termes de concentration et de disponibilité;
• fixation d’objectifs spécifiques avec l’organisation de challenges et la mise en place de primes spécial ramadan;
• mobilisation spéciale des managers de proximité pour maintenir la motivation et l’implication des collaborateurs durant le mois sacré;
• organisation d’activités de cohésion permettant de développer le sentiment d’appartenance et l’adhésion aux valeurs de l’entreprise (en particulier le respect du client). C’est ainsi que le groupe CAM par exemple organise chaque année un tournoi de football Spécial Ramadan en plus de ses diverses activités socioculturelles en faveur du personnel;
• la productivité ne dépendant pas seulement des actions physiques des travailleurs, mais aussi de leur état d’esprit, de leurs émotions et de leur position de vie, il convient de rechercher dans la démarche spirituelle du jeûne des éléments et des messages de nature à motiver le collaborateur pour continuer à s’investir dans son travail et à assumer ses responsabilités envers l’organisation et envers les autres en toutes circonstances.
