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Agriculture

Souveraineté alimentaire : Comment le Maroc compte sécuriser 80% de ses besoins en céréales d’ici 2030

Une superficie d’un million d’hectare sera consacrée au céréales et légumineuses pour assurer une production annuelle de plus de 80 millions de quintaux. 150.000 des terres seront irriguées, qu’il pleuve ou non. Voici le programme.

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Le ministère de l’Agriculture est actuellement en train de déployer une stratégie nationale pour sécuriser une grande partie des besoins du pays en céréales et légumineuses. D’après le ministre Ahmed El Bouari, la recette est toute prête et sa mise en œuvre est en cours. Il s’agit de mobiliser une superficie d’un million d’hectares irrigués, entièrement ou en appoint, exclusivement réservée aux céréales et aux légumineuses.

Cela va permettre de produire environ 80 millions de quintaux par an. Selon de récentes statistiques, le Maroc consomme environ 82 millions de quintaux de blé tendre par an et près de 5,5 millions de quintaux de légumineuses. Les mesures prises par le ministère sont simples et s’inscrivent dans le cadre d’un contrat-programme signé avec la filière, pour un budget de 7,3 milliards de dirhams.

« Nous avons une vision claire », explique le ministre qui intervenait, vendredi, dans un programme radio. « Nous visons un million d’hectares de céréales résistantes à la sécheresse pour permettre à notre pays de produire 80 millions de quintaux par an, qu’il pleuve ou non ». Voilà qui est dit. Il s’agit en fait de déconnecter les besoins de la souveraineté alimentaire des aléas de la pluviométrie. « Cela, nous allons le faire avec l’irrigation complémentaire », assure le ministre.

Cela consiste, dans les zones « bour », quand la pluie tarde, à apporter un complément hydrique pour sauver la production. « Cela ne demande pas beaucoup, juste 1.000 à 1.500 mètres cubes par hectare, et nous pouvons y arriver. Nous y travaillons d’ailleurs ». En réalité, explique l’ancien directeur de l’Irrigation et de l’Aménagement de l’espace agricole, « nous travaillons pour que l’eau de l’agriculture reste pour l’agriculture et que l’eau potable reste pour la consommation des ménages, de l’industrie et des activités de services ».

En effet, « aujourd’hui, l’eau des barrages va à la consommation », c’est la conséquence de sept années consécutives de sécheresse. Mais, « est-ce raisonnable que Casablanca, par exemple, consomme l’eau destinée à l’agriculture de la région de Doukkala ? », s’interroge le ministre. « Bien sûr, la priorité va à la consommation en eau potable, c’est naturel et c’est ce que prévoit la loi, mais ce déficit doit être équilibré. Même dans les villes, il faut réduire la consommation pour laisser une part à l’agriculture ». Là, c’est une autre paire de manches.

Bref, le Maroc reste un pays agricole, et l’eau, il faut la mobiliser de toutes les manières possibles. « Il nous faut un stock stratégique annuel. Nous avons les moyens de le sécuriser, et ces moyens, ce sont des solutions évidentes », dit-il.

« Nous avons une vision claire : chaque périmètre irrigué aura ses ressources, et nous allons ajouter des stations de dessalement. Nous prévoyons environ un milliard de mètres cubes d’eau à consacrer à notre agriculture, pour irriguer 150.000 hectares, qu’il pleuve ou non », assure le ministre.

Pour l’eau potable, le dessalement

En effet, maintenant, au sein du gouvernement, tout le monde est convaincu que toutes les villes côtières du Maroc doivent être approvisionnées en eau potable par le dessalement de l’eau de mer. C’est une stratégie qui est déjà à l’œuvre. Des projets d’envergure sont déjà lancés, certains encore au stade d’études et d’autres en cours de finalisation.

Ainsi, Oujda, Berkane, Saïdia, Nador, Driouch, seront alimentés par la nouvelle station de Nador, actuellement en projet. Al Hoceima a déjà sa propre station. À Tanger, il y aura également une station de dessalement. À Rabat, il y en aura une aussi, dont le contrat de réalisation a été conclu en octobre de l’année dernière lors de la visite du président français au Maroc.

À Casablanca, la station de dessalement sera opérationnelle vers la fin de l’année prochaine ou au plus tard au début de 2027. Avec la station de Safi et celle de Jorf Lasfar, développées par l’OCP, plusieurs villes sont alimentées, ou en cours, en eau potable dans la région Casablanca-Settat et même des villes de l’intérieur comme Khouribga et Marrakech qui sera approvisionnée en 80 millions de mètres cubes par an.

À Agadir, une station est déjà en activité, et actuellement en cours d’extension. Il y aura une nouvelle station à Tiznit, qui sera la plus grande à l’échelle nationale avec 350 millions de mètres cubes par an. Nous avons aussi une station à Tan-Tan, une à Guelmim, une à Laâyoune, qui sont plus petites et couvrent les besoins de ces villes. Une autre station est projetée à Boujdour, et celle de Dakhla, sur laquelle nous travaillons aujourd’hui et qui sera finalisée et mise en service dans les semaines à venir.

C’est finalement pourquoi l’eau des barrages sera dorénavant réservée à l’agriculture pour qu’on atteigne un équilibre entre les besoins et les apports en eau compris non conventionnels. En parallèle, il y a aussi le projet d’interconnexion des bassins hydrauliques dont les deux premières phases sont déjà opérationnelles.