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Idées

Paillettes et flonflons

Quelle meilleure ouverture sur l’autre que ces Å“uvres cinématographiques qui, chacune à  sa manière, vous font pénétrer dans des univers et des imaginaires plus riches et plus incroyables les uns que les autres, montrant à  la fois la différence et la similitude de ce que sont et de ce que vivent les êtres ? La tenue du FIFM permet au public marocain de voir des films qu’il n’aurait jamais vu par ailleurs.

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IIl est fascinant de voir combien les hommes sont aimantés par les feux des projecteurs. Rien à dire, le grand Architecte de l’univers a bien conçu les choses. Il a fait en sorte qu’en chaque partie se retrouve un élément du tout. Ou, si l’on préfère, que le code de base soit le même en tout et dans tout. L’être humain se veut supérieur aux autres créatures vivantes, parce qu’il pense. Pourtant, face à ce qui brille, la fébrilité soudaine qui s’empare de lui le rend à l’image d’un papillon aveugle. Irrésistiblement attiré par la lumière, il se précipite, s’agglutine et tente de se fondre en celle-ci comme si telle était sa raison d’être. Dans un monde soumis à la domination de l’image, d’autant plus.

Marrakech, comme chaque année en cette période automnale, est à la fête. Pour la dixième édition de son festival du cinéma, la ville ocre a mis les bouchées doubles. Une brochette impressionnante de stars, parmi les plus célèbres au monde, est venue fouler son tapis rouge. Comme ailleurs lors de pareil évènement, ce sont des centaines de personnes qui, chaque soir, se sont bousculées pour voir celles-ci descendre de leur voiture et prendre la pose devant les photographes. Des bras qui se tendent, des cris qui fusent à l’apparition des vedettes préférées, une ambiance festive et joyeuse, le spectacle était autant devant le lieu des festivités qu’à l’intérieur. Il était dans cette foule, essentiellement composée de jeunes qui, sous le halo blanc, faisaient le pied de grue pour entrapercevoir les idoles du nouvel Olympe. Et ce spectacle-là montre combien le besoin de rêve et de magie est prégnant en l’individu, quelle que soit sa race ou sa nationalité.

Le Festival international du film de Marrakech (FIFM) fête donc ses dix ans. Conçu comme une réponse aux tendances régressives qui travaillent le monde musulman et le poussent au repli sur soi et à la détestation de l’Occident, il est l’une des manifestations culturelles phare du nouveau règne. Mais lancé en 2001, il a bien failli connaître le sort d’un enfant mort-né. En effet, à quelques jours de son démarrage, les tours du World Trade Center s’effondraient en direct, sous les yeux abasourdis de la planète. Les attentats du 11 Septembre venaient d’avoir lieu, frappant les Occidentaux d’effroi et de sidération. Alors, bien sûr, pour nombre d’invités à cette première édition du FIFM, il n’était plus question de prendre part à une manifestation qui se déroulait en terre d’Islam. Sous la pluie des annulations, la question se posa aux organisateurs de savoir s’il demeurait pertinent ou non de démarrer l’aventure. La décision prise fut le maintien du lancement aux dates prévues. Dix ans plus tard, au vu de ce que le FIFM est devenu, il y a lieu de s’en réjouir. Des films de toute beauté sont projetés, qu’ils soient en compétition ou hors compétition, l’organisation est impeccable, la brochette des stars présentes, impressionnante (Martin Scorcesse, Francis D. Coppola,  James Caan, John Malkovitch, pour ne citer que ceux-là) et puis, surtout, il y a tous ces jeunes qui, dès le matin, font la queue pour retirer des billets. Quelle meilleure ouverture sur l’autre que ces œuvres cinématographiques qui, chacune à sa manière, vous font pénétrer dans des univers et des imaginaires plus riches et plus incroyables les uns que les autres, montrant à la fois la différence et la similitude de ce que sont et de ce que vivent les êtres ? La tenue du FIFM permet au public marocain de voir des films qu’il n’aurait jamais vu par ailleurs, soit parce qu’il s’agit de films d’auteur, soit en raison de la thématique traitée. Rosa Morena du Brésilien Carlos Augusto de Oliveira, qui raconte l’histoire d’un homosexuel dont le rêve est d’adopter un enfant, en est l’exemple parfait. En cela, ce festival participe autant à éduquer le regard qu’à faire évoluer les mentalités.

Reste cette fascination que les stars du cinéma exercent sur les foules. Hier saltimbanque, l’acteur est aujourd’hui l’objet d’une invraisemblable adulation. Pourtant, de plus en plus, les films racontent des histoires dures, décrivent des réalités violentes, n’invitent plus au rêve. Comment comprendre donc cette émotion et cette frénésie qu’ils suscitent sur leur passage ? La réponse à cette question renseigne sur ce qui, aujourd’hui, motive et fait bouger les foules.