SUIVEZ-NOUS

Pouvoirs

Peut-on céder une partie de son portefeuille client ?

Je suis un courtier d’assurance, et souhaite, pour redresser un peu ma situation financière, procéder à  une vente partielle de mon portefeuille clients. Néanmoins, mon fonds de commerce fait l’objet d’une saisie conservatoire. Pour votre information, le prix de vente d’une partie du portefeuille sera destiné à  désintéresser un bénéficiaire de nantissement sur le matériel appartenant à  mon cabinet. Ai-je le droit de procéder à  cette cession partielle, étant entendu que le prix sera versé dans le capital du cabinet et servira à  le libérer de dettes diverses dont le nantissement et autres charges, exceptée la saisie conservatoire ?

Publié le


Mis à jour le

Je voudrais d’abord rappeler l’esprit de la saisie conservatoire apportée par l’article 453 du code de procédure civile. «La saisie conservatoire a pour effet exclusif de mettre sous mains de justice les biens meubles et immeubles sur lesquels elle porte et d’empêcher le débiteur d’en disposer au préjudice de son créancier; en conséquence, toute aliénation consentie à titre onéreux ou à titre gracieux, alors qu’il existe une saisie conservatoire, est nulle et non avenue».
De plus, l’objectif d’une saisie conservatoire d’un fonds de commerce est de mettre sous surveillance de la justice un bien qui constitue une garantie d’une créance au profit d’un tiers.
D’ailleurs, si publicité dans le cas de vente de fonds de commerce est d’ordre public, c’est pour permettre à ses créanciers de faire prévaloir leurs droits sur le fonds objet de cession. Dans votre cas, il ne s’agit pas de vendre le fonds de commerce ni un des éléments qui le composent, mais plutôt une partie du portefeuille clients. Ainsi, si vous procédez à la vente juste de quelques clients, c’est au créancier de prouver que cette vente a porté atteinte à ses droits sur le fonds de commerce, et à vous de persuader le juge du contraire avec éléments tangibles.
En effet, il ne faut pas que la vente de la partie du portefeuille ait un impact financier direct et substantiel sur la valeur du fonds de commerce. Si c’est le cas, il y aurait manifestement atteinte aux intérêts du créancier, et partant vous tombez sous le coup de l’article 453 du code de la procédure civile. A titre d’exemple, votre portefeuille client est composé de plusieurs clients mais dont un seul constitue 90 % de votre chiffre d’affaires, et les 10 % restants sont répartis sur les autres clients, si vous procédez à la vente du premier client, vous ne pourriez pas prétendre avoir vendu une partie de votre portefeuille mais presque la totalité ; auquel cas vous ne pourriez pas échapper à la nullité de cette transaction comme le précise l’article sus-cité. Ceci étant, votre transaction peut être  défendable, sachant que vous avez l’intention de vous libérer d’un nantissement si :
– vous ne menacez pas les droits et intérêts du créancier titulaire de la saisie conservatoire ;
– vous n’allez pas provoquer un appauvrissement du fonds de commerce ou une diminution de sa valeur.  
Les deux arguments essentiels à faire prévaloir devant le juge si l’affaire est portée devant le tribunal par le créancier sont :
– purger le fonds de commerce du nantissement ;
– assurer la continuité de l’activité.
Autre option à envisager : c’est de saisir le président du tribunal qui a prononcé la saisie conservatoire et lui solliciter une levée partielle pour la vente d’une partie du portefeuille clients en avançant les mêmes arguments sus-cités.