Affaires
Une vingtaine de propositions pour relancer le marché du travail
• Avec le modèle actuel de traitement de la question de l’emploi et du chômage, et celui des jeunes en particulier, nous sacrifions une génération du marché de l’emploi.
• La législation du travail inadaptée aux nouvelles générations d’entreprise (start-up) et aux nouveaux modes de travail (contrat, rémunération, télétravail et autres…).
• L’emploi n’est plus une question seulement économique ou sociale, s’il n’est pas traité dans l’urgence, il deviendra un enjeu de sécurité.
Les chiffres ne mentent pas. Avec une création annuelle moyenne de 50 000 emplois ces dernières années pour un besoin minimum de 600 000 (jeunes diplômés, décrocheurs et personnes inscrites officiellement au chômage), nous sommes loin du compte. Notre économie ne crée pas suffisamment d’emplois pour s’assurer un développement durable et juste. Au Maroc, 1 point de PIB produit en moyenne 35 000 emplois. Notre économie, déjà faible de par la structure de ses fondamentaux et ses moyens, va mettre du temps à revenir à un cycle «normal». Et si tout le monde, ou presque, partout ailleurs, a fait le choix de sauver les entreprises pour limiter la casse en matière d’emplois et de perte de revenus pour les salariés, il est un fait certain et admis par tous que plus rien ne sera comme avant. «L’orthodoxie habituelle des faiseurs de politique économique et sociale est interrogée aujourd’hui grâce ou à cause d’un virus», écrit Jamal Belahrech, un spécialiste du domaine, dans un «Plaidoyer pour l’emploi». Grâce à un virus, enfin, poursuit-il, «les acteurs du monde politique, économique et social vont faire une pause. Une fois le virus vaincu durablement, ils chausseront les bonnes lunettes pour voir réellement l’état du monde et, partant, poser les bases d’une nouvelle démarche». Ainsi, en matière d’emploi, le constat est là, les chiffres sur le chômage varient peu et les solutions qui étaient imaginées jusque-là pour relancer la machine semblent limitées.
Et pour cause. Nous nous focalisons sur le taux de chômage alors que «nous devrions nous concentrer sur le taux d’emploi qui est autrement plus pertinent pour nous permettre de mieux agir».
De même, nous semblons ignorer que, finalement, ce n’est pas le ministère de l’emploi ou l’État qui décrète l’emploi. C’est sans doute pour cela que toutes les recettes imaginées par les différents ministres qui se sont succédé au poste, nonobstant leurs qualités et compétences, n’ont, en fin de compte, pas permis un vrai décollage de l’emploi. Ce sont, par ailleurs, exclusivement les entreprises qui créent des emplois. Et c’est à ce niveau qu’il faut agir. Partant du principe que l’entreprise est un moteur de progrès social puissant, «il faut lui créer les conditions de cette réussite pour que la société puisse bénéficier de l’ensemble de ce résultat».
Pour cela, il faut permettre à l’entreprise d’être plus agile, plus compétitive, avec des politiques économiques, fiscales et sociales volontaristes et équilibrées. «Accepter le débat et la mise en place d’une TVA sociale fait partie de cette révolution nécessaire pour asseoir un équilibre fiscal et une stabilité sociale», lit-on dans ce plaidoyer.
Dans le monde de la révolution numérique et de la transformation digitale tous azimuts, dans lequel nous entrons, demande encore plus d’agilité et d’innovation. Dans ce monde, il est impératif d’avoir une législation qui soit un outil d’aide au développement, plutôt qu’un frein à la croissance. Notre législation du travail actuelle est caduque, constate l’auteur de ce plaidoyer.
La revisiter «ne veut pas dire installer la précarité totale et l’insécurité pour les salariés. Il s’agit de l’alléger tout en responsabilisant davantage, voire en pénalisant encore plus fort son non-respect». Il faut donc changer de logique et faire confiance à la majorité des opérateurs économiques au lieu de verrouiller à cause d’une minorité.
Les défis futurs résident donc en la capacité de bâtir un nouveau modèle de croissance, imaginer le travail de demain, changer le rapport au travail pour les salariés, avoir une vision nouvelle de l’entrepreneuriat et de l’entreprise, accepter le rôle fondamental des partenaires sociaux, ne plus former des compétences ou des filières dont notre pays n’a plus besoin. «Voilà nos véritables défis pour les années à venir», conclut-il. Car il ne faut pas oublier que l’emploi n’est plus une question seulement économique ou sociale, s’il n’est pas traité dans l’urgence, il deviendra un enjeu de sécurité.
